Nos jeunes repoussent de plus en plus l'âge du mariage. Ces derniers se marient au-delà des 33 ans. Un phénomène qui puise son origine dans les nombreux problèmes socio-économiques. Le mariage se fait de plus en plus tard pour les Algériens. Selon les statistiques les plus récentes, ils sont près de huit millions à être encore célibataires. Le dernier rapport publié par l'ONS (Office national des statistiques), révèle qu'en 2008 l'âge moyen au premier mariage en Algérie était de 33 ans pour l'homme et 29 ans pour la femme, alors qu'il était de 31 ans pour les hommes et 27 ans pour les femmes, en 1998. Crise financière, crise du logement, envie de faire une carrière ou envie d'évasion, ou encore refus d'assumer une nouvelle responsabilité, ont concouru à une situation matrimoniale assez inédite en Algérie. De ce fait, les raisons qui poussent les Algériens à repousser de plus en plus l'âge de leur mariage sont diverses et variées. Un phénomène qui prend de l'ampleur et qui commence à s'installer, ce qui ne manque pas d'inquiéter. Des sociologues, spécialistes de la question, évoquent même une «épidémie» de célibat. S'agissant du pourquoi de cette situation, ces mêmes spécialistes avancent plusieurs hypothèses, notamment celles liées à des problèmes socioéconomiques. La première étant liée à la définition même du «mariage». En effet, que veut dire «mariage» pour les jeunes d'aujourd'hui? L'image, qui se profile dans les esprits de ces derniers, loin des clichés de l'amour et de la famille, c'est d'abord la fête nuptiale. Aujourd'hui, la célébration du mariage est perçue comme synonyme de «ruine» au regard du prix, de plus en plus exorbitant, à débourser pour sceller une union. Les traditions algériennes en la matière ont beaucoup évolué depuis l'époque de nos parents, grands-parents et aïeux. Petit à petit, le cortège nuptial avec à sa tête la Mercedes rétro ou encore la petite Jetta a laissé place à la Touareg ou le Hammer et la Limousine (loués au prix fort). La traditionnelle «m'hiba» constituée de savonnettes, de parfums ou encore quelques habits, don de la belle-famille à la nouvelle mariée, s'est muée en un véritable pont d'or. Un trésor qui doit être réuni par le marié qui s'endette, parfois pour de nombreuses années, au mépris de la situation financière de la nouvelle famille et de sa stabilité. Cela, sans parler du «sdaq». Celui-ci est soumis annuellement à un mouvement inflationniste. Un étalage d'opulence économique de façade, jeté sans retenue à la face des sans-emploi et des sans-logis. «Comment voulez-vous qu'un simple fonctionnaire puisse réunir tout cela sans l'aide de ses proches? (...) Il me faudra des mois, voire une année d'économie pour pouvoir acheter, ne serait-ce que la chambre à coucher», a expliqué Habib, un boulanger proche de la quarantaine. Mais avant d'arriver à la literie et la penderie, les futurs candidats au mariage sont généralement confrontés à un problème de taille, celui du gîte. La crise du logement est un des facteurs primordiaux faisant obstacle au mariage dans notre société. D'autant que peu de parents acceptent aujourd'hui que leur fille s'installe chez sa belle-famille, exigeant un logement indépendant. Mohamed, chirurgien-dentiste dans un hôpital du Centre a déclaré à ce sujet: «Je suis issu d'une famille de neuf personnes, nous vivons dans un petit appartement avec deux de mes frères mariés (...) Je ne peux pas songer au mariage pour l'instant.» Il y a un autre facteur qui retarde l'âge du mariage chez les Algériens: l'amélioration du niveau d'instruction des femmes. Celles-ci sont plus nombreuses à faire des études supérieures qu'elles font même passer avant leur vie sentimentale. Ces jeunes filles instruites attendent aussi le «bon parti» avant de se faire passer la bague au doigt, un parti qui soit du même «niveau qu'elles». Pour Marya, enseignante à l'université d'Alger et future docteur d'Etat, «les études sont la clé de la réussite professionnelle et personnelle (....) Je veux assurer mon avenir même si cela nécessite de rester célibataire quelques années encore». Certains sociologues ayant mené des enquêtes sur le sujet, expliquent le recul de l'âge du mariage en Algérie par «une transition démographique rapide avec le prolongement des études, l'élévation du niveau d'instruction chez les femmes qui font souvent le choix du célibat». Une situation qui aurait fait jaser, il y a dix ou vingt ans. En effet, une jeune fille trentenaire était considérée comme vieille fille, vouée au «célibat à perpétuité». Aujourd'hui, cette dernière représente le symbole de la réussite professionnelle précédant l'engagement dans une vie conjugale. Toutefois, le cap des 40 ans reste une limite à ne pas franchir, au risque de rester célibataire à vie. D'autant qu'il y a le risque, qu'à terme, se posera la question du renouvellement de la population qui, sans qu'on s'en rende compte, s'infléchit vers un certain vieillissement. Le temps où l'on se glorifiait du taux élevé de jeunes du pays semble bel et bien révolu.