Le plat pays va prendre la présidence tournante de l'Union européenne jeudi prochain sans avoir résolu la question du gouvernement. Divisée et sans gouvernement, la Belgique s'apprête à prendre la présidence semestrielle de l'Union européenne à compter du 1er juillet avec des ambitions «modestes» alors que l'Europe demeure confrontée à une crise économique d'une ampleur sans précédent depuis 50 ans. «Nous serons d'abord au service des institutions européennes», a prévenu vendredi le Premier ministre belge, Yves Leterme, en présentant son programme. «Nous voulons adopter une position modeste», a-t-il ajouté. Le pays n'a guère le choix. M.Leterme n'est en poste que pour gérer les affaires courantes jusqu'à ce qu'une nouvelle coalition gouvernementale soit mise en place suite aux récentes élections, remportées par les indépendantistes flamands. Ce qui est attendu au plus tôt en octobre. D'ici là, le gouvernement tiendra les rênes de l'Europe avec une légitimité et une crédibilité pour le moins émoussées. Et lorsque la nouvelle équipe arrivera au pouvoir, elle aura peu de temps pour se mettre à jour. Une telle situation s'est déjà produite pour l'UE au premier semestre 2009 lorsque le gouvernement tchèque a chuté au beau milieu de sa présidence, faisant perdre toute influence à Prague dans la conduite des affaires européennes. Et pourtant, le programme de la présidence belge dresse un constat inquiétant de la situation, avec une «crise d'une ampleur sans précédent depuis 50 ans», des déficits énormes, une population vieillissante et la concurrence des puissances émergentes. «De quoi se pendre?», se demande le grand quotidien belge francophone Le Soir. Le programme belge entend aider à mettre en place une stratégie de sortie de crise et accélérer la régulation du secteur financier. Mais la vraie priorité sera institutionnelle: «donner de l'espace» au président permanent de l'UE, un autre Belge, Herman Van Rompuy, et à la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton. «Nous sommes prêts à limiter notre rôle de présidence tournante parce qu'il faut donner de l'espace à Herman Van Rompuy et à Catherine Ashton pour qu'ils puissent exercer leurs nouvelles compétences», a affirmé M.Leterme. Depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le pays qui prend la présidence tournante de l'UE assure plutôt un rôle de co-pilote que de chef d'orchestre des affaires européennes. Et ce rôle peu spectaculaire convient aux Belges, qui pendant six mois avec M.Van Rompuy détiendront les principaux leviers de l'UE. La Belgique entend jouer un rôle de «facilitateur» de compromis, a expliqué M.Leterme. Fidèle à cette ligne «modeste», le calendrier de la présidence belge réserve peu de surprises, mais peut-être un sujet conflictuel, la gouvernance de l'euro. Le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes Olivier Chastel a déclaré que la Belgique voulait voir ce sujet progresser «considérablement» au cours de sa présidence, même s'il n'a pas donné de détails. Le sujet divise les Européens. La France a plaidé en vain pour un «gouvernement économique» propre aux pays utilisant la monnaie unique, idée finalement abandonnée dans l'immédiat en raison du refus de l'Allemagne et des pays de l'Est qui redoutent une césure en Europe. Le gouvernement se fera au niveau de toute l'UE. En attendant, les Belges, pour une fois quasi unanimes, assurent que l'UE ne sera pas la victime collatérale de la crise politique qui oppose francophones et néerlandophones sur l'avenir du pays depuis maintenant trois ans. «La présidence belge de l'UE ne sera pas du tout gênée par la période de transition» actuelle, a ainsi estimé le leader de la N-VA, récent vainqueur des élections, Bart De Wever, qui prône «l'évaporation» à terme de la Belgique.