Belle réminiscence africaine qui nous a fait rappeler, le temps d'une soirée, la ferveur d'un certain Panaf 2009... On prend le même et on recommence. C'est le cas de le dire, ici. L'ex-festival afro-gnawa jazz s'appelle désormais Diwane. La troisième édition de cette manifestation incontournable de l'été a débuté avant-hier au même endroit c'est-à-dire aux bois des arcades de Riad El Feth. A noter que le prix d'entrée a été revu à la baisse soit 200 DA contre 400 DA l'an dernier. Une stratégie somme toute banale pour ramener plus de monde. C'est à 21h que se fait l'ouverture avec le premier lauréat du Festival national diwan de Béchar, Ouled Houssa d'Algérie. Il est annoncé en grande pompe par les deux animateurs de la soirée, les deux frères trublions, Hichem et Yacine Mesbah. Le groupe gnawi fait une entrée remarquée en allant jouer carrément en bas de la scène, pour plus de proximité avec le public. Le son du karbabou rententit dans le plein air, poussant les jeunes à aller occuper la place et danser sans le moindre épuisement, à l'infini. Au bout d'une heure de gnawi traditionnel, la reine de la soirée, la diva du Mali est invitée à monter sur scène, accompagnée de ses musiciens et de ses deux choristes, danseuses. Elle est drapée de l'emblème national algérien au grand bonheur des supporters de foot. La soirée est en fait inaugurée officiellement par la présence, côté algérien, de Zehira Yahi, conseillère auprès de la ministre de la Culture, Khalida Toumi, Lakhdar Fellahi, le commissaire du festival et de Son Excellence l'ambassadeur du Mali, salué à plusieurs reprises par la chanteuse malienne. Celle-ci interprètera, durant plus d'une heure, des morceaux chantés dans la tradition du Wassoulou, la région des siens. Attachée à ses racines africaines, Oumou n'aura de cesse, durant le concert, de faire appel à la conscience des gens pour la sauvegarde de notre continent dont dira-t-elle, est «l'avenir du monde». Elle interprétera Kounadya qui veut dire «la bonne étoile» pour dire sans doute le malheur qui frappe certains pays en Afrique et la nécessité de se battre pour faire régner la paix, mais aussi la vie dans des pays qui crèvent de famine et de maladie en Afrique. Elle plaidera aussi pour le rapprochement entre les peuples, l'Algérie se trouvant aux frontières du Mali. Watou est une chanson qui parle des gens braves qui cultivent la terre. Si les textes sont incompréhensibles à l'oreille, la musique parle, elle, à l'âme et parvient naturellement à nous communiquer sa chaleur. Généreuse, Oumou Sangaré sait transmettre son affection à l'Afrique mère. Belle vision aussi que celle d'un public dansant sous une lumière tricolore rappellant les trois couleurs du drapeau national. La musique d'Oumou Sangaré est parfois nonchalante, parfois remuante, bien entrainante rappelant celle des hommes du désert, les Touareg. La quintessence artistique est la même car au bout du compte, le coeur qui bat au centre, est animé par la passion de l'Afrique. La musique dans la peau, les deux danseuses, le montrent si bien et sont l'incarnation même de ce sang qui coule dans les veines des hommes du continent noir. Oumou Sangaré évoque l'amour en y opposant les guerres fratricides, résultat justement du manque d'amour dans le monde et exhorte l'assistance au partage, à plus d'amour entre les individus et les nations. Oumou Sangaré n'hésite pas à parler longuement des instruments de ses musiciens et d'évoquer leur origine, tout en faisant remarquer qu'avant l'arrivée du colonisateur, l'ordre régnait en Afrique... Des instruments séculaires comme le ngoni, lequel était rehaussé du son de la guitare, de la basse, de la flûte et du djembé. Une percussion typiquement africaine sur laquelle un musicien algérien a été invité à s'exercer l'instant d'une improvisation bien léchée. Réussie haut la main! La reine de la soirée fera chauffer l'assistance qui ne cessera de danser jusqu'à la transe. Belle soirée sous les étoiles d'Alger. Et ce n'est que le commencement. Au programme ce soir Noudjoum Eddiwane (lauréat n°2 du Festival national diwan de Béchar) et Amrat Hussain Trio, précédé à 16h, du film documentaire de Ali Farka Touré, Le miel n'est jamais bon dans une seule bouche de Marc Huraux et de la conférence portant sur le thème «Etude sur le rite de la nechra» qui sera présentée par Mouni Djekrif, de l'université de Constantine.