Jeudi, Hassan Nasrallah, le chef du parti chiite, a confirmé les spéculations qui allaient bon train depuis des mois au Liban. L'annonce par le chef du Hezbollah chiite Hassan Nasrallah que des membres de son parti allaient être mis en cause par le tribunal de l'ONU dans l'assassinat du dirigeant Rafic Hariri augure d'une nouvelle période de tensions au Liban, redoutent des analystes. «Cette nouvelle situation est très alarmante», affirme Paul Salem, directeur du Centre Carnegie pour le Proche-Orient. «Le Hezbollah est dans une situation très inquiétante.» Jeudi, le chef du parti chiite a confirmé les spéculations qui allaient bon train depuis des mois au Liban. Il a ainsi révélé avoir été informé par le Premier ministre, le sunnite Saâd Hariri, que des membres «indisciplinés» de son parti allaient être mis en cause par le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) dans l'assassinat de son père, l'ancien Premier ministre Rafic Hariri tué en 2005. Créé en 2007 par une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies, le TSL est chargé de juger les auteurs présumés d'attaques au Liban, dont l'assassinat de Rafic Hariri. La presse s'inquiétait hier des répercussions de l'annonce de Hassan Nasrallah sur la situation dans le pays, et surtout de l'éventualité que l'acte d'accusation, attendu entre «septembre et décembre», vienne confirmer ce scénario. «La crainte aujourd'hui est la menace d'une explosion dans un lieu de prière de la banlieue sud de Beyrouth (à majorité chiite) (...), d'une attaque contre un hôpital dans une région chiite de Beyrouth», écrivait Al Akhbar, quotidien proche du Hezbollah, s'inquiétant de la réaction «de la rue sunnite». Nasrallah a lui-même affirmé jeudi que le Liban entrait «dans une phase délicate». Rafic Hariri, ancien Premier ministre devenu opposant à l'hégémonie de Damas au Liban, a été tué avec 22 autres personnes dans un attentat à la camionnette piégée à Beyrouth le 14 février 2005. Les deux premiers rapports de la commission d'enquête de l'ONU avaient conclu à des «preuves convergentes» mettant en cause les renseignements syriens et libanais. Pour Oussama Safa, directeur du Centre libanais pour les études politiques, «Il y a un risque à hauteur de 50% pour que le pays» soit entraîné dans un nouveau cycle de violences. «Je pense que toutes les parties ont intérêt à contenir» les conséquences du scénario où le Hezbollah est pointé du doigt. Beaucoup craignent une répétition des événements de mai 2008, lorsque, visé par deux décisions du gouvernement dominé par le camp de Saad Hariri, le puissant groupe armé avait opéré un coup de force à Beyrouth. Le pays s'était embrasé pendant une semaine, avec un bilan de 100 morts. Pour les analystes, un élément pourrait «sauver» la situation: le rapprochement qui s'opère depuis l'arrivée de Saad Hariri au pouvoir avec le puissant voisin syrien, qu'il avait autrefois accusé dans l'assassinat de son père et qui est l'un des principaux soutiens du Hezbollah. «Je crois que plus la relation entre M.Hariri et la Syrie s'améliore, plus il y aura une détente et plus on sera capable de juguler toute réaction violente», affirme M.Safa. L'analyste et bloggeur politique Elias Muhanna affirme quant à lui que, d'ici la publication de l'acte d'accusation dans quelques mois, les révélations de Nasrallah n'auront plus le même poids. «L'histoire sera disséquée, analysée, ce sera de l'histoire ancienne», juge-t-il sur son blog Qifa Nabki. D'ailleurs, selon le chef du Hezbollah, Saâd Hariri lui a promis de dire en public que le Hezbollah n'avait rien à voir avec l'assassinat et qu'il s'agissait juste de membres «indisciplinés».