Malgré l'hostilité ambiante, il aura réussi cette première sortie dans la région. En effet, avec la venue de son n°2 à Aïn El-Hammam, le FFS a déployé toutes ses forces dans la région. Avec sa phraséologie acerbe et son verbe caustique, Djeddaï a effectué une véritable démonstration de force devant la foule des grands jours estimée entre 10.000 et 15.000 personnes. Ainsi, donc, tôt le matin, le décor, approprié pour l'affrontement, était déjà planté dans cette cité considérée comme le plus grand bastion d'Aït Ahmed en Kabylie. Deux îlots humains se sont constitués. Au devant de la scène improvisée, le premier, acquis au FFS, s'égosillait au leitmotiv du parti, du style: «Assa azzeka, da l'Hocine yella, yella...». A l'arrière-plan et perché sur les garde-fous, d'une rampe, le deuxième, résolument antivote, ressassait les mots d'ordre des ârchs. A 13h 30, Djeddaï faisait son apparition sous un tonnerre d'applaudissements, entrecoupés par les huées des jeunes hostiles, appuyés par les délégués locaux. La scène est bombardée de projectiles et un premier affrontement direct est signalé. Toutefois, la situation est vite maîtrisée, Djeddaï salue la foule qui répond: «Illa l'vote yella.» «A la violence, nous répondons par le débat contradictoire. Je lance une invitation et en même temps un défi aux ârchs à venir s'exprimer. S'ils nous persuadent de l'utilité de leur action, alors nous allons nous retirer de la course électorale», tonne, d'emblée, le premier secrétaire national du FFS. La voix de Djeddaï parvenait en filigrane entre les répliques des deux «camps». On en restait là, puisque, après, aucun débordement n'est signalé et les deux se limitaient à une guerre verbale. Même si, par à-coup, toute l'attention se braquait sur quelques voix «off», décidément déterminées à faire avorter cette sortie. Le calme revenu, Djeddaï reprenait son discours: «En participant aux élections locales, notre objectif est d'éviter à la Kabylie un bain de sang. Nous voulons épargner cette région du pourrissement programmé par le pouvoir et ses relais locaux», explique-t-il. Abondant dans le même sens, il accusera le RCD (sans le nommer) d'être derrière tous les maux vécus par la population kabyle. «Le FFS ne fait pas dans l'opposition des salons. Qui a dit: M.Bouteflika, la Kabylie est derrière vous? Qui s'est acoquiné avec les généraux?», s'est interrogé Djeddaï, avant de rassurer et la population et les candidats quant à l'affrontement fratricide 10 octobre prochain Dans la foulée, une pierre lancée d'en haut, le frôle à la jambe. «Ni l'agression, ni la pression et encore moins les pressions ne nous font peur et nous ferons changer de vision politique», martela-t-il, entrecoupé par le fameux «Rouh ami rouh...». Impassible aux provocations, Djeddaï affirmera que «le FFS est la force dominante dans le centre du pays», tout en promettant «aux aventuriers de tout bord un raz de marée le 10 octobre». Enchaînant avec le mouvement des ârchs, le bras droit d'Aït Ahmed dira: «Ce mouvement avait été dévié de sa trajectoire originelle à force de manipulation du pouvoir et d'un certain parti. Il existe encore des délégués animés de bonne foi, mais les brebis galeuses ont pris le dessus.» Djeddaï rappellera que «le FFS a apporté assistance aux premiers noyaux de ce mouvement extraordinaire», avant de regretter qu'«il soit aujourd'hui tombé entre les mains des apprentis sorciers». Cela dit, il estime que «les (ses) futurs élus renforceront les ârchs et exporteront la protesta vers d'autres wilayas». Par ailleurs, Djeddaï se montrera conciliant en martelant: «Notre seul adversaire, ce ne sont ni les partis ni les ârchs, notre seul et grand adversaire ce sont les généraux.» La foule, en transe, scande: «A bas les généraux, les généraux dehors.» Juste au moment où Djeddaï donnait rendez-vous à la population le 3 octobre prochain à Tizi Ouzou, ainsi que le 10 octobre dans l'isoloir, une pluie diluvienne s'abattait sur Michelet. «Un cadeau du ciel», ironisera-t-il devant une assistance qui s'est dispersée dans le calme.