En plus des dangers sur la santé et les désagréments engendrés par cette pratique, la trésorerie de l'Etat se trouve amputée d'une manne financière considérable. C'est déjà le mois de jeûne et la régulation des prix est sur toutes les lèvres. Alors que ceux-ci s'envolent au niveau des commerces légaux, les trottoirs de la ville de Tizi Ouzou sont toujours occupés par les marchés informels. Les citoyens ahuris par les étals des magasins et des marchés espèrent trouver une petite réduction du côté des trabendistes. Une indescriptible anarchie fait le quotidien des populations dans la ville des Genêts. Alors que les trottoirs du centre-ville et des boulevards y convergeant sont occupés par les magasins, d'autres sont squattés par le commerce informel. En l'espace de deux décennies, ce dernier a envahi tous les espaces de la ville de Tizi Ouzou et bien au-delà. Tous les produits qui se trouvent dans les magasins sont disponibles chez le marchand du coin. Les vendeurs sont devenus plus nombreux que les commerçants légaux inscrits au registre du commerce. Les trottoirs et les jardins publics ont changé de vocation. Ce sont des marchés à ciel ouvert. Une réalité qui n'est hélas, pas partielle, bien au contraire, le boulevard Lamali, longeant le CHU Nédir et la route de l'université en sont une incantation de ce phénomène qui ne cesse de se généraliser. Ces espaces aménagés pour la circonstance, sont pourvus de toutes les commodites pour faire de sorte que le commerce s'exerce de la manière des marchés réguliers et légaux. Des parasols, des étals géants ainsi que des tentes abritant les clients pendant l'hiver, sont installés sur tous les trottoirs. Toutes les marchandises sont disponibles. Il y va de l'habillement, de la quincaillerie, de l'agroalimentaire jusqu'aux fruits et légumes. Sur ces boulevards, les passants se confondent avec les chalands. Tous sont contraints de circuler sur la voie publique. Le coude-à-coude avec les automobilistes d'un côté, et les commerçants d'un autre qui considèrent les trottoirs comme leur propriété, le ras-le-bol est grand. Par ailleurs, ces commerces qui s'exercent tout le long du boulevard Lamali jusqu'à l'université Hasnaoua causent d'énormes désagréments au niveau du CHU Nédir dont l'entrée principale est obstruée par la foule. Souvent bloqué, le portail de cet établissement sanitaire d'envergure régionale souffre de cafouillages toute la journée. Les malades évacués en ambulance se voient contraints d'attendre. Quelques instants devant le portail pourraient être fatals au blessé ou au malade qui souvent nécessite une intervention chirurgicale en urgence. De l'autre côté de la ville, le boulevard Chaffaï vit le même calvaire. Les commerces illégaux ont squatté les trottoirs bloquant ainsi la circulation. De ce côté également, la clinique Djahnine subit les affres des bouchons créés par ces étals. Les passants assistent quotidiennement à des bagarres entre les citoyens qui osent réclamer un petit passage aux vendeurs qui ont fini, avec le temps, par croire que les trottoirs font partie de leurs droits. Ce constat n'est, par ailleurs, pas pour arranger les choses du point de vue sanitaire. Ces produits vendus sur les trottoirs ne répondent nullement aux exigences de conformité. Les populations ont souvent été intoxiquées suite à la consommation de certains produits achetés chez ces vendeurs. L'on a même signalé des maladies causées par des chaussures et des vêtements dont l'origine reste inconnue. En plus des dangers sur la santé, c'est bien la trésorerie de l'Etat qui se trouve amputée d'une manne financière considérable. Et contrairement au voeu des autorités locales de se réapproprier ces espaces, il s'avère que c'est l'inverse qui est constaté. Tous les jours, ces vendeurs s'imposent comme les maîtres des lieux. Cependant, ce problème qui dure depuis des années n'est pas uniquement du ressort des services concernés. La culture populaire a rapidement adopté ce genre de comportement. Les marchés à ciel ouvert ont toujours attiré les populations qui cherchent de bonnes «occasions» à des prix qui ne ressemblent guère à ceux pratiqués dans les magasins. Les tentatives des services concernés de se débarrasser de ces commerces ont toujours buté sur beaucoup d'inconvénients. Les vendeurs en question ne seraient pas tentés de s'installer si le commerce n'était pas florissant. Tout ce qui est exposé est vite écoulé. Les gens ne peuvent pas se passer de ces marchés. Les marchandises à bon prix arrangent les petites bourses qui ne sont plus obligées de subir le diktat des magasins. Certains citoyens considèrent, bien au contraire, ces commerces illégaux, comme une bénédiction. Un citoyen interrogé sur ce phénomène confirmait, en effet, les inconvénients de ces marchands, mais n'a pas hésité à dire que sans eux, les gens marcheraient nus à cause des prix pratiqués dans les magasins. La concurrence imposée par les produits des trottoirs a considérablement aidé à rendre les effets vetimentaires abordables. Devant cette situation, les pouvoirs publics, au lieu de trouver des solutions, restent de marbre. Car si la société, pour différentes raisons n'arrive pas à se défaire de ce phénomène, il faut dire que l'informel fait travailler des milliers de jeunes et nourri des milliers de familles. Sans ce travail, tous ces vendeurs deviendront des sans-emploi. C'est pourquoi, les solutions à apporter ne devront pas ignorer ce fait. L'organisation de la vie quotidienne dans la ville de Tizi Ouzou passe aussi par une politique adéquate d'aménagement des espaces. Ces commerces, selon certains, sont réellement indispensables, mais ils doivent être fiscalisés et orientés vers des places spécialement conçues à cet effet. Il est également mentionné que ces jeunes ont souvent répondu par des émeutes aux tentatives de les chasser de ces lieux. Vraisemblablement, de leur côté, les actions des services de sécurité n'ont pas la même signification. Pour ces jeunes, libérer ces espaces, c'est les priver de leur gagne-pain. Trouver une issue à cet épineux problème passe d'abord par la résolution du problème de l'emploi. Une question: pourquoi ces jeunes préfèrent être constamment chassés à la matraque que d'aller voler? Une autre question de culture.