Tête haute, Omar Khadr a écouté l'accusation énoncer les cinq chefs d'accusation pesant contre lui parmi lesquels «meurtre», «espionnage» et «soutien matériel au terrorisme». Le Canadien Omar Khadr, arrêté à 15 ans, a commencé mardi à comparaître à Guantanamo devant un tribunal militaire d'exception pour la première journée de son procès, le premier pour crime de guerre sous l'administration Obama. Vêtu à l'occidentale d'un costume gris et cravate rose saumon, qui tranche avec l'habituel uniforme blanc des prisonniers de Guantanamo dits «conciliants», le jeune homme, aujourd'hui âgé de 23 ans, a pris place à côté de ses avocats pour la première journée d'audience consacrée à la sélection du jury. Tête haute, il a écouté l'accusation énoncer les cinq chefs d'accusation pesant contre lui parmi lesquels «meurtre», «espionnage» et «soutien matériel au terrorisme». Interrogé après l'audience sur la tenue de son client, son avocat civil canadien, Denis Edney, a déclaré que quand le jeune homme s'est regardé dans une fenêtre, «il a rougi, c'est la première fois depuis huit ans qu'il se sent humain». Omar Khadr est accusé d'avoir lancé, en juillet 2002 en Afghanistan, la grenade qui a tué Christopher Speer, un soldat américain de 28 ans, lors de l'attaque de la cache d'Al Qaîda dans laquelle il confectionnait des bombes. Fils d'un haut responsable d'Al Qaîda mort en 2003, l'adolescent a passé son enfance entre le Canada, l'Afghanistan et le Pakistan. Il nie avoir lancé la grenade et ses avocats estiment que ce procès est «le premier d'un enfant soldat dans l'histoire moderne». Quinze officiers militaires ont écouté mardi les instructions du juge militaire Patrick Parrish, leur expliquant que le gouvernement américain avait la charge de prouver la culpabilité de l'accusé et qu'ils devaient prendre leur décision sans avoir de doute, mais sans «certitude mathématique» non plus. L'accusation puis la défense ont ensuite commencé à les interroger collectivement, dressant les lignes de la complexité d'un procès intervenant huit ans après les faits et impliquant un accusé qui était mineur à l'époque des faits jugé par des militaires pour le meurtre d'un militaire. «Pensez-vous qu'il est injuste de présenter comme preuve des déclarations faites par l'accusé?», «pensez-vous qu'il n'est pas bienvenu de juger quelqu'un huit ans après les faits?», «pensez-vous qu'il est inapproprié de juger un mineur pour des faits graves?», a demandé le procureur Jeff Groharing. «J'ai l'honneur et le privilège de défendre Omar Khadr» a, de son côté, déclaré Jon Jackson, son avocat militaire en se présentant aux potentiels jurés. «Omar, peux-tu te lever et dire bonjour?», a-t-il ajouté alors que le jeune accusé qui a passé un tiers de sa vie dans les geôles de Guantanamo se levait et saluait le panel en souriant. Le lieutenant-colonel Jackson a ensuite balayé les différentes difficultés qui vont ponctuer le procès. «Il existe des preuves scientifiques que la mémoire des faits est moins bonne à mesure que le temps passe, tout le monde en est conscient?», «Vous êtes d'accord que les enfants peuvent être influencés négativement par leurs parents?», «Que pensez-vous de moi, un militaire, défendant Omar accusé du meurtre d'un militaire?», a-t-il notamment interrogé. A l'issue de la procédure de sélection, le jury doit être composé d'au moins cinq officiers. Lundi, le juge Parrish avait créé la surprise en estimant recevables comme éléments à charge les «aveux» qu'Omar Khadr dit avoir fait sous la contrainte dans la prison de Bagram en Afghanistan puis à Guantanamo.