Après Alain Juppé, c'est au tour de l'ex-ministre du Logement, Christine Boutin, de monter au créneau pour critiquer les dernières propositions du chef de l'Etat français en matière de sécurité. «Nous sommes tous d'origine étrangère», a déclaré l'ancienne ministre du Logement qui avait fait les frais du dernier remaniement ministériel du gouvernement Fillon, dans une interview accordée au quotidien Le Parisien. Christine Boutin répondait à une question concernant le projet de déchéance de la nationalité française, qui touche certains délinquants d'origine étrangère, préconisé par le président de la République française. «Tous les textes existent déjà, et ils sont difficilement applicables. De telles déclarations vont créer une instabilité chez nos compatriotes. Et de qui parle-t-on, quand on évoque les Français d'origine étrangère? Beaucoup de Français sont d'origine étrangère, nous le sommes tous peu ou prou, à commencer par le président de la République lui-même! Comment peut-il oublier ça? Qu'est-ce que ça veut dire? On va créer des Français à l'essai? Où met-on le curseur? Ce discours conforte les peurs, elles-mêmes génératrices de violence. Il prouve aussi notre incapacité à intégrer», a déclaré la présidente du Parti chrétien-démocrate. Et comme pour enfoncer le clou elle a ajouté: «Les déclarations de circonstance sont toujours mauvaises et il n'est pas bon de monter les Français les uns contre les autres, car il existe une violence latente parce que la stigmatisation de telle ou telle communauté exacerbe la violence.» Christine Boutin s'est aussi élevé contre l'amalgame entretenu autour de l'immigration et de la délinquance. La voix discordante de la candidate à l'élection présidentielle de 2002, ne fait pas exception à droite. Elle vient s'ajouter à d'autres qui en disent long sur l'âpreté du débat qui attend la majorité présidentielle. Les mesures annoncées par Nicolas Sarkozy sont loin de faire l'unanimité. Le président du Sénat avait jugé précipitées les mesures concernant la déchéance de la nationalité française, qui visent certains criminels d'origine étrangère. «Une République responsable doit s'occuper de la sécurité, et l'Exécutif est dans son rôle quand il fait des propositions. Mais applique-t-on réellement le droit déjà en vigueur? L'article 25 du Code civil ne fournit-il pas déjà la réponse à la plupart des questions posées? C'est ce que nous devrons vérifier», a fait remarquer dans une interview parue dans les colonnes du Figaro Gérard Larcher. Les élus du palais Bourbon seront très sourcilleux quant à l'adoption d'un texte de loi à ce sujet. La partie est sans aucun doute, loin d'être gagnée pour l'Elysée. Il sera en effet bien difficile pour Nicolas Sarkozy de rallier à son projet certaines voix de droite qui comptent dans le paysage politique français. Alain Juppé en fait partie. Dans un commentaire publié sur son blog jeudi 12 août, l'ex-Premier ministre de Jacques Chirac annonce la couleur. Il ne participera pas à la «mascarade»! La liste des opposants au projet présidentiel devrait s'allonger dans son propre camp même à l'instar du député de Versailles (Yvelines). «Je suis opposé à la proposition du président de la République de remettre en cause l'acquisition de la nationalité française de citoyens français d'origine étrangère nés sur le sol français ou naturalisés», avait fait savoir sur son blog Etienne Pinte. L'ancien secrétaire d'Etat à l'Information de Georges Pompidou (1962), s'était déjà manifesté en s'opposant contre le renvoi forcé par charter des Afghans, présents illégalement en France, décidé par Eric Besson, ministre de l'Immigration, au mois d'octobre 2009. L'affaire du respect du droit de la personne n'est pas une affaire de droite ou de gauche. Sarkozy est averti.