«Tous les termes de la coopération antiterroriste avec les six pays de la région seront revus de fond en comble.» Toutes les démarches entamées, depuis deux ans, tous les efforts des six pays du Sahel pour combattre Al Qaîda viennent d'être réduits à néant. A cause de leurs démarches unilatérales, la France et l'Espagne ont torpillé le Front du Sahel laissant l'Algérie seule face à Al Qaîda. Qu'à cela ne tienne. Des sources sécuritaires en charge du dossier du Sahel ont affirmé hier à L'Expression que «l'Algérie reste sur sa position et refuse de participer à l'alimentation des réseaux d'Al Qaîda par le paiement des rançons» car, estiment les mêmes sources, «cet argent va servir à l'achat d'armes et de munitions qui seront dans quelque temps utilisées contre les pays mêmes qui ont versé de l'argent dans les caisses d'Al Qaîda». «Concernant ses engagements envers d'autres pays, elle aura tout à revoir», ont estimé nos sources. Ce qui est désormais sûr est que même l'Europe n'est pas prête à faire face au terrorisme international. Aucun pays n'a jugé nécessaire de respecter la décision de l'ONU concernant justement la criminalisation des versements de rançon aux terroristes La libération des deux Espagnols lundi dernier contre une rançon de 8 millions d'euros et l'extradition de Omar le Sahraoui le cerveau de l'opération de l'enlèvement, qui a eu lieu en novembre dernier en Mauritanie, vers le Mali, vont à coup sûr encourager Al Qaîda au Maghreb islamique à perpétrer plus d'attentats et à opérer plus de kidnappings, notamment contre les ressortissants européens. Et c'est une certitude pour les services de sécurité algériens, qui confient avoir suivi avec beaucoup d'attention le déroulement des derniers événements. Soit depuis le raid franco-mauritanien lancé après l'échec des négociations entre la France et Al Qaîda et la libération des deux otages espagnols contre une rançon de 8 millions d'euros. Ces mêmes services se disent outrés par la façon avec laquelle les Européens prétendent combattre le terrorisme. On a accordé trop d'importance à cette organisation criminelle. A présent, elle revient au- devant de la scène pour donner des leçons à la France. Tout le monde rappelle le rôle de la France dans ce scénario d'otages au Sahel. Elle a exercé une pression sur le Mali pour qu'il se soumette aux exigences d'Al Qaîda. De ce fait, quatre terroristes ont retrouvé le chemin de la liberté dont deux Algériens revendiqués par les services de sécurité. Le tout en échange de Pierre Camatte, un otage français. Madrid a-t-elle aussi exercé une pression sur la Mauritanie pour qu'elle fasse extrader Omar le Sahraoui vers le Mali? Pour nos services de sécurité, ce qui se passe dans cette zone est vraiment confus. Le Mali semble avoir trouvé de bonnes affaires grâce à Al Qaîda et en aucun cas il ne raterait cette occasion, ces propos ne sont pas exagérés, ni démesurés, puisque on sait pertinemment que de hauts cadres de la société malienne et responsables ont mis à la disposition des terroristes un important lot d'armes entre 2007 et 2010, et on sait aussi que c'est Mokhtar Ben Mokhtar qui tire toutes les ficelles, sachant que celui là même a bien réussi à s'imposer dans cette région en tissant des liens de parenté avec les plus importantes tribus touarègues. En tout cas pour nos services de sécurité, la coopération antiterroriste dans la région du Sahel ne sera plus fructueuse dans ces conditions. Le premier pays menacé est la France, accusé par Al Qaîda d'avoir fait capoter les négociations et d'avoir été à l'origine de la neutralisation de six des siens. Al Qaîda menace la France de représailles et se vante d'avoir donné une leçon aux services secrets de cet Etat après l'échec du raid franco-mauritanien et qui a conduit à la mort de l'otage français Michel Germaneau. La France a refusé de commenter les propos d'Al Qaîda rapportés par la presse. Dans ce contexte, Bernard Valero, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères a souligné qu'il ne commente pas les déclarations de terroristes. Et de poursuivre: «Nous avons appris avec soulagement la libération des deux otages espagnols. Nous nous associons à la joie de leurs familles et des autorités espagnoles.» S'alignant ainsi avec l'Espagne pour partager la joie des familles des otages libérés, la France affirme par contre, qu'il n'y a jamais eu de négociations avec Al Qaîda pour la libération de Michel Germaneau. «Jamais, nous n'avons eu la possibilité d'entrer en contact avec Al Qaîda pour la libération de Michel Germaneau», a déclaré récemment Claude Guéant, secrétaire général de l'Elysée et principal collaborateur du président Nicolas Sarkozy. «Lorsque la vie d'un Français est en jeu, la France est toujours prête à négocier, c'est ce qui s'est passé avec un précédent otage, Pierre Camatte», a assuré Claude Guéant, en précisant que les deux hommes n'étaient pas détenus par le même groupe au sein d'Al Qaîda. Après ce qui vient de se passer, l'Algérie va certainement adopter un comportement de méfiance vis-à-vis des pays voisins quant à la lutte antiterroriste car, a priori, cette lutte ne semble pas avoir le même sens.