Les accusations que les transformateurs et les responsables se renvoient sont révélatrices d'une grande anarchie. La production nationale du lait cru reste en deçà des attentes. Pour y remédier, le ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Rachid Benaïssa, propose de «doubler» les primes pour les opérateurs qui utilisent uniquement du lait cru. En revanche, «ceux qui ne travaillent qu'avec la poudre de lait seront exclus du dispositif d'incitation.», a indiqué le ministre, hier, sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale. «Nous essayons de renforcer le rythme de la collecte du lait cru. Actuellement, on est en négociations au sein du Conseil interprofessionnel du lait pour favoriser toutes les laiteries qui ne travaillent qu'avec du lait cru. Et peut-être faire pression sur celles qui ne travaillent qu'avec la poudre.», a-t-il souligné. «Les pousser à ce qu'elles s'intéressent à la production nationale, même en partie.», a-t-il ajouté. Elles sont près d'une quinzaine d'unités de production à utiliser le lait cru parmi une centaine d'autres que compte la filière. La production globale attendue à la fin de l'année 2010 est de 2,6 milliards de litres. Elle reste de loin inférieure aux besoins nationaux qui sont estimés à 3,5 milliards de litres par an. Actuellement, une tension sur le lait pasteurisé en sachet se fait durement sentir dans les périphéries des grandes villes et dans certaines wilayas à l'intérieur du pays. Même si elle n'est pas perceptible dans les grandes agglomérations urbaines. Depuis quelques jours, le lait en sachet est presque introuvable dans quelques régions. Serait-ce les prémices d'une grande pénurie de ce produit de première nécessité? Une réduction drastique des quotas de poudre de lait que l'organisme de régulation, l'Office national interprofessionnel du lait, distribue aux transformateurs serait-elle à l'origine de cette situation? «Ce n'est pas vrai!», insiste Abdelhafid Djellouli, directeur général de l'Onil, joint par téléphone. Et d'expliquer: «La direction générale de l'Onil travaille dans le cadre du Comité interprofessionnel du lait. Depuis plusieurs mois l'ensemble des professionnels de cette filière se concertent sur la question.» La décision de baisser le quota de poudre de lait est donc toujours à l'étude au niveau du Conseil interprofessionnel du lait. C'est ce que confirmera une source du ministère de l'Agriculture et du Développement rural. Les multiples déclarations faites, dernièrement, au sujet d'une hypothétique réduction de quotas ne seraient, selon cette source, qu'une tentative de la part des grandes laiteries d'exercer une pression sur l'Onil. «Afin que celui-ci n'applique pas la décision de la baisse des quotas de poudre de lait qui leur sont accordés.», fait-elle observer. «Il y a des laiteries qui destinent une part du quota qui leur est accordée pour produire des fromages et du yaourt...avec de la poudre subventionnée et destinée à la production du lait en sachet. Ce qui est illégal. Il n'y a qu'à voir la qualité du lait en sachet!», ajoute encore cette source du ministère de l'Agriculture. Pour M.Djellouli, c'est plutôt les perturbations dans les circuits de distribution qui sont à l'origine du manque de lait en sachet dans certaines régions. «Cela nous échappe. Cette opération appartient aux laiteries», précise-t-il. La mesure de la baisse des quotas de la poudre de lait, dont les professionnels de la filière sont en train de débattre aujourd'hui, entre dans une stratégie globale du département de Rachid Benaïssa pour encourager la production locale. «La mesure que le Comité interprofessionnel du lait veut introduire a pour objectif d'inciter ces laiteries à acheter et/ou produire le lait cru et diminuer ainsi la facture allouée à l'importation du lait en poudre de 30% chaque année.», souligne cette source de la tutelle. D'un autre côté, des quantités importantes de poudre de lait ont été bloquées au niveau des ports. La cause? Des investigations que la direction générale des Douanes aurait menées, selon TSA, un site d'information «sur le trafic qui caractérise l'importation de cette matière». Les premiers résultats des enquêtes évoquent, selon TSA, «des pratiques frauduleuses avérées, particulièrement par le recours à la majoration des factures d'importation de lait en poudre». Ce secteur névralgique traverse, actuellement, une crise profonde provoqué par la désorganisation. Le mal reste à venir.