La France officielle ne s'est pas encombrée pour voter une loi glorifiant le colonialisme le 23 février 2005. Jamais la Fondation du 8 Mai 1945 n'a réagi avec autant d'accent et de «virulence» par rapport à l'actualité. Cette fois-ci, l'actualité a été faite par les déclarations, sur les ondes de la Radio nationale, du président de l'APN, Abdelaziz Ziari, qui a définitivement enterré le projet de loi sur la criminalisation du colonialisme. «Scandaleux et honteux, tels sont les qualificatifs à inscrire sur l'enseigne du fronton de la chambre basse du Parlement algérien qui fait montre d'incapacité à répondre aux aspirations de son peuple» a tempêté la fondation présidée par Kheireddine Boukhrissa dans un communiqué envoyé hier à notre rédaction. Un communiqué étoffé, dosé, digne d'une déclaration de guerre: «Scandaleux pour les propos avancés par le président de l'Assemblée populaire nationale exprimant clairement une tentative avérée d'enterrer une revendication légitime soutenue par tout un peuple et exprimée dans un projet de loi incriminant le colonialisme, déposé par plus d'une centaine de députés», souligne le document. «Honteux pour avoir encore une fois blessé la mémoire collective et le manquement au devoir envers ceux qui grâce à eux et par la sanction des urnes l'ont porté sur le piédestal représentatif, cependant indigne, de la vox populi. Il fait montre d'incapacité et d'un manque de courage flagrant», ajoute le document de la fondation. Pour la Fondation du 8 Mai 1945, la tentative de mettre sous scellé un projet de loi incriminant le colonialisme «est l'expression ultime, signe avantcoureur, d'une décadence des institutions de l'Etat». La fondation estime en outre que la décision de suspendre l'avant-projet de loi criminalisant le colonialisme qu'elle a qualifiée «d'irresponsable» est le pire cadeau de l'Aïd que l'assemblée puisse offrir à un peuple avide de vérité et en permanente expectative d'un signe probant d'une réelle indépendance. «Quel deal a été établi entre les deux pouvoirs pour pousser le nôtre à tourner le dos à son peuple?», s'est interrogée la fondation dans son document ajoutant que «c'est à la mémoire de ceux tombés au champ d'honneur que nous revendiquons haut et fort notre droit à la vérité. C'est par devoir de mémoire en tant que citoyens à part entière que nous exigeons toute 1a vérité sur ce revirement indigne et spectaculaire». L'institution que dirige M.Boukhrissa a rappelé que le collectif des associations soutenant le projet de loi, et à leur tête la Fondation du 8 Mai 1945, la famille révolutionnaire, les partis politiques et personnalités «qui ont adhéré et soutiennent l'initiative de concrétisation de ce projet historique, déçus, s'indignent devant les propos du président de l'Assemblée populaire nationale sur le report aux calendes grecques de la loi incriminant le colonialisme». Les propos de M.Ziari qui ont suscité l'ire de la fondation, interviennent à quelques jours seulement de la célébration du 5e anniversaires de la Réconciliation nationale. «Les propos du président de l'Assemblée sont un souffle dans le brasier non encore éteint de la décennie noire. Ils ouvrent imprudemment aujourd'hui un front populaire de résistance sur les 85%, de ceux qui ont soutenu, il y a cinq ans, l'initiative du président de la République, à se réconcilier avec soi, ses amis, ses frères, son Etat et son histoire» lit-on dans le même communiqué. Plus offensif, plus virulent, le document de la fondation note que «la France officielle ne s'est pas encombrée d'argumentaires, ni de raisons diplomatiques pour exprimer sa xénophobie ou légiférer en toute quiétude. Son président de l'Assemblée ne s'est pas justifié, ni mesuré la sensibilité des officiels algériens et encore moins son peuple, quand la loi du 23 février 2005 a été votée. Ni avoir consulté son homologue algérien pour décider de marginaliser les victimes algériennes des essais nucléaires dans une loi piège».