Désormais, fini la complaisance avec les membres du gouvernement. Tout a commencé durant le Ramadhan, quand le ministre de la Communication, Nacer Mehel, a reçu instruction de la part du président de la République d'améliorer le contenu de l'information à l'Entv en donnant plus de temps de parole au peuple. Désormais, la politique de «l'avis et l'avis opposé», jusque-là appliquée sur Al Jazeera, sera de mise au Journal télévisé de 20h, considéré comme la véritable messe de l'Entv. Les journalistes de l'Entv ont reçu instruction de passer au crible toutes les insuffisances, dans les secteurs sensibles, comme la santé, les travaux publics, le logement, l'éducation, la sécurité et surtout les droits de l'homme. Et ce traitement touche également le passage de certains ministres au JT de 20h. Désormais, fini la complaisance pour les membres du gouvernement. Leur passage à l'antenne sera réduit et l'importance sera donnée tant au secteur qu'à la présentation du ministre. Même chose pour les élus locaux et les walis. Désormais, il est interdit de filmer les walis et les élus aux cotés de ministres ou de leur accorder la parole si cela ne cadre pas avec le sujet. Ainsi, les équipes de l'Entv qui travaillent sur le terrain ont reçu instruction de ne pas faire le jeu de certains élus et walis, qui n'hésitent pas à utiliser souvent la télévision pour améliorer leur image auprès des ministres et de la présidence alors que leur région est parfois abandonnée. Cette nouvelle donne de la politique générale de l'Entv fait craindre le pire à certains walis, qui n'apprécient pas le traitement de la Télévision nationale ces derniers temps. C'est le cas du wali d'Alger, qui s'est plaint des sujets sur le logement et la santé diffusés par l'Entv sur sa wilaya. Le large changement des walis intervenu hier fait craindre le pire aux nouveaux chefs de l'administration locale. Dorénavant, les walis et élus doivent soigner leur attitude avec les journalistes de l'Entv, qui ne font que leur travail de service public. Ces changements dans le traitement de l'information se sont poursuivis depuis. Jeudi, par exemple, la séance des questions orales à l'APN a été résumée en quelques secondes; seul le ministre de la Communication, Nacer Mehal, s'est exprimé pour saluer l'avancée du traitement de l'information par l'Entv. Il a saisi l'occasion en tant que ministre de tutelle de l'Entv, pour «s'excuser» de la qualité des programmes durant le mois de Ramadhan et a promis une amélioration pour l'avenir. Cette déclaration officielle, forte de sens d'un ministre de la République, et responsable du secteur, ne fait que renforcer les partisans de ce changement à l'Entv et écarter les récalcitrants au sein même de l'entreprise publique de la télévision, qui prône une télévision «incolore» et «indolore». Mercredi, le Journal Télévisé a, à l'occasion de l'anniversaire de l'adoption de la politique de Charte pour la paix et la réconciliation, donné la parole, pour la première fois, à une famille de disparus. Il a été également donné la parole à la presse écrite en diffusant même l'avis de ceux qui critiquent la politique de la Charte nationale. Désormais, il faut équilibrer les discours, la pensée unique est révolue à l'antenne. Ce changement de ton et de liberté, a été déjà perçu il y a quelques jours par la diffusion de la réaction de Louisa Hanoune, qui avait mis l'accent sur «les restrictions des libertés syndicales, individuelles et collectives et avait demandé même de laisser manifester les familles des disparus». Une déclaration sur la situation des droits de l'homme qui ne serait jamais passée au JT de 20h, il y a quelques mois. Depuis, la télévision a diffusé un sujet (pour la première fois) sur la crise ArcelorMittal de Annaba en donnant la parole aux syndicats grévistes. Et on a même autorisé et montré quelques images des manifestations de l'association SOS Disparus. Il faut dire que dans le passé à l'Entv, les sonores des chefs des partis politiques sont triés et sélectionnés par les responsables de l'information et parfois même par le directeur général de l'Entv en personne, quand il s'agit d'un sujet épineux, pour ne pas créer de remous au niveau du ministère de l'Intérieur, très sensible aux déclarations des chefs politiques, notamment sur la liberté d'expression et les droits de l'homme. Dorénavant, les chefs des partis politiques auront leur part de passage à l'Entv et il n'y aura pas de censure.