A la veille de la tournée de Christopher Ross au Maghreb, la rencontre entre les deux hommes n'a pas fait l'objet d'une communication sur le conflit du Sahara occidental Diplomatie oblige. Le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies n'avait pas le droit à l'erreur. Il ne pouvait compromettre les consultations que doit entreprendre son représentant personnel aujourd'hui, en vue de relancer les négociations entre le Front Polisario et le Maroc. Ban ki-moon qui participait depuis le 16 octobre à la troisième édition de la World Policy Conference (WPC), consacrée à la «Gouvernance mondiale», n'a pas outrepassé les limites que lui imposait sa visite au Royaume alaouite. Ce qui n'a pas été le cas de l'héritier du trône marocain qui a réussi à distiller son message sur la question des territoires occupés du Sahara occidental. «Nous avons engagé comme réformes institutionnelles et réconciliations courageuses historiques, sociales, en matière des droits de l'Homme et dans le domaine de l'espace territorial. Il s'agit notamment de l'initiative audacieuse que Nous avons proposée pour régler le différend artificiel suscité autour de la marocanité de notre Sahara. A cet égard, le Conseil de sécurité et la communauté internationale ont qualifié de crédibles et sérieux les efforts déployés pour lui donner corps», a déclaré Mohammed VI dans une allocution adressée aux participants à la troisième World Policy Conference qui s'est ouverte samedi matin à Marrakech. Un appel du pied au secrétaire général de l'ONU et un clin d'oeil à son envoyé spécial qui sera dans la région le 18 octobre. Ban ki-moon n'a point réagi au discours du roi et a respecté son obligation de réserve. Les médias marocains, quant à eux, ne l'ont point commenté. Ont-ils fait contre mauvaise fortune bon coeur? Le silence du SG de l'ONU a-t-il été vécu comme une frustration? En coulisses, le sujet a été très probablement abordé. La presse marocaine qui a fait part d'entretiens entre les deux hommes n'a pas donné plus de détails. Mohammed VI a reçu, samedi dernier, au Cabinet royal, à Rabat, Ban Ki-moon. «Cette audience s'est déroulée en présence du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, M.Taïb Fassi Fihri, et de M.Taye Brook Zerihoun, conseiller principal du secrétaire général de l'ONU», a rapporté dans une de ses dépêches, laconique, datée du 16/10/2010, l'agence de presse officielle marocaine MAP. On n'en saura pas plus. Le Maroc, qui n'a pas hésité à exploiter le moindre chuchotement en faveur de son projet d'autonomie pour le Sahara occidental (déclarations d'Alain Delon et d'une poignée de sénateurs français, voir L'Expression du 24 juin et du 16/09/2010), est certainement moins à l'aise devant le fait accompli. La répression dans les territoires occupés du Sahara occidental n'est pas une simple vue de l'esprit. Dans un communiqué, Amnesty International vient d'appeler les autorités marocaines à la libération «immédiate» et «sans conditions» des militants sahraouis des droits de l'homme détenus à Salé (Maroc) suite à leur visite aux camps de réfugiés sahraouis de Tindouf. Des prisonniers politiques ont été transférés dans un état comateux de la prison d'Aït Melloul (Maroc) vers l'hôpital de Tiznit (Maroc)... La récurrente question des droits de l'homme devrait occuper une place centrale dans les discussions que tiendra Christopher Ross avec les responsables du Front Polisario. Le Maroc, de son côté, partira avec un sérieux handicap qui devrait battre en brèche son projet d'autonomie. La 4e Commission de l'Assemblée générale des Nations unies chargée de la décolonisation a adopté à l'unanimité, lundi, à New York, une résolution qui réaffirme le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination. Paradoxalement, le conflit du Sahara occidental n'est pas près de voir le bout du tunnel, et Christopher Ross n'est pas au bout de ses peines.