Belkhadem s'est exprimé..., c'est bien! Il est le Secrétaire général du glorieux parti du FLN et personne ne lui dénie ce droit. Il peut même en dire davantage pour haranguer les militants et les mettre sur le droit chemin de la contribution efficace au développement national. Mais quand il s'arroge le droit de défendre l'indéfendable, c'est là que le bât blesse. Car, notre Secrétaire général semble s'accommoder de pratiques surannées et d'autoritarisme entêté. Et c'est grave! En effet, c'est grave de constater que le FLN subit les persécutions et les humiliations de responsables qui ne savent même pas où mettre les pieds, ou peut-être si, dans un guêpier, qu'ils ont eux-mêmes, si adroitement, créé. Ce qui me fait réagir présentement, c'est l'article de Nadia Benakli du lundi 18 octobre, que je trouve fort judicieux. Je lui dis merci de m'avoir donné cette occasion pour, encore une fois, aller au charbon, comme à l'accoutumée. Ainsi, «La situation au niveau du FLN n'est pas dramatique et les affrontements sont un signe de bonne santé», comme l'a déclaré le SG du FLN, le 16 octobre dernier, à la Conférence nationale des élus. Mais nous sommes en 2010 et cette ritournelle est fredonnée par ce même responsable depuis qu'il est à la tête du FLN. Consultons les oracles, pardon les archives de la presse nationale, pour savoir que rien n'a changé dans ce «royaume d'inféconds» où de graves dissidences, doublées de confrontations et carrément de bagarres se sont érigées en culture, malheureusement. Faisons une petite rétrospective. Nous sommes en avril 2005 et ça se passe en Kabylie, où les élus FLN défient leur direction. La presse dit: «Le Secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem, a annoncé hier la démission de 50 élus de ce parti des sièges qu'ils occupaient dans les APC et les APW de Kabylie. Belkhadem n'a fait, en réalité, que confirmer un état de fait, déjà, largement constaté sur le terrain. En effet, les signes avant-coureurs d'une «rébellion» des édiles du FLN étaient, déjà, dans l'air à l'occasion d'une réunion tenue, il y a plus d'une semaine, au niveau de la mouhafadha de Tizi Ouzou, où les élus du parti de Belkhadem avaient, clairement, affiché la couleur. Le même constat a, d'ailleurs, été fait à Béjaïa.» Des exemples concrets En avril 2006, on étale de la violence, et cette fois elle n'est pas verbale, elle ressemble à cette toute première, à Mostaganem, où de pseudo-responsables «turbulents» sont venus avec des gourdins et des dobermans pour imposer leur loi et s'attaquer effrontément à de grands dirigeants du FLN. Des exemples concrets?: - Khenchela: 11 blessés dans les rangs du FLN. «L'installation de la kasma FLN de la commune de M'toussa, située entre Khenchela et la ville de Aïn Beïda, par la commission de wilaya, a été marquée par des rixes et des affrontements, violents, ayant fait onze blessés. Six blessés seront évacués vers l'hôpital de Khenchela et cinq autres vers l'hôpital de Aïn Beïda.» - Sougueur: «La même situation, les mêmes affrontements et les mêmes problèmes.» - Oran: «Des dizaines de militants du FLN, qui se sont rassemblés hier au siège de la mouhafadha, avant l'intervention des forces de l'ordre, scandaient des slogans, pour protester contre la venue de l'émissaire de Abdelaziz Belkhadem à Oran..., qui est divisée en trois clans.» Dans la même année, et 6 mois plus tard, en novembre 2006, nous apprenons les divagations du «FLN-nouveau». Que dit la presse?: - «A Constantine, le FLN traverse une forte zone de turbulences. En effet, une des ailes de ce parti tente d'imposer au poste de mouhafedh un individu qui aurait eu des démêlés avec la justice et qui est un militant actif...du RND.» A n'y rien comprendre, lorsque le légendaire FLN se met à défendre de véritables «intrus» ou carrément des opportunistes qui, de surcroît, ne sont pas en odeur de sainteté auprès de la justice...! A Alger, et en novembre 2007, un média rapporte qu'un candidat a été maintenu sur la liste FLN, malgré sa ferme opposition. Et de rappeler que les prochaines élections locales tournent à la tragi-comédie, voire à la dérision. Le FLN préfère, pour l'instant, selon le candidat proposé, «mettre au devant le nanisme et la sénilité, à la place de la fraîcheur et de la grandeur dans l'esprit et l'intelligence». Aussi, il refuse que son «capital militant et électif, propre et irréprochable, soit utilisé pour cacher la médiocrité». Au cours de la même année également et le même mois, novembre 2007, le Secrétaire général du FLN a été questionné au sujet de la bagarre qui a eu lieu, à Oran, entre deux hauts responsables, un député et un sénateur, et où ils en sont venus aux mains. L'agressé, en l'occurrence le sénateur, a eu, d'après le médecin traitant, une incapacité physique de plusieurs jours. Le SG du FLN, lors d'un point de presse, animé à Oran, dira: «Cette adversité, même si elle entraîne des disputes, est le signe fort de la bonne santé du parti. S'il y a friction ou bagarre comme vous dites, cela se passe entre deux militants FLN et celui qui gagne, quel qu'il soit, reste du FLN. Donc, quel que soit le résultat de la bagarre, le FLN est toujours le gagnant.» CQFD! Quelle remarquable démonstration, quelle intuition prospère et quelle éclatante clairvoyance pour un avenir lumineux à l'ombre d'un parti où l'on se bagarre, non pas à coups d'idées, mais à coups de poing! Est-ce de l'insolence, une réponse pareille? Est-ce du mépris ou, tout simplement, de la dérision? En tout cas, une réponse de ce genre n'est pas à mettre au tableau d'honneur d'un parti qui, hier pour très peu, a mis ses gens dans des situations très inconfortables!...Mais que voulez-vous, ceux qui sont là, ne connaissent pas bien la maison. Ce sont quelques échantillons d'échauffourées et de chocs que nous avons enregistrés un peu partout, après l'entrée en lice des chiens, des matraques et des massues... Ils sont tellement nombreux - dont cette dernière «bataille de Annaba» -, que nous n'osons les reproduire, un à un, au risque de vous faire contracter une vilaine overdose, pouvant vous entraîner dans les abysses de la répugnance. Ce ne sont là que les conséquences d'une gestion catastrophique d'un FLN qui aurait dû être entouré de plus de respect et de considération pour le passé ô combien glorieux! qu'il a assumé, du temps de la Révolution. En effet, nous pouvons donner autant d'échantillons qui démontrent, si besoin est, toute l'impuissance de nos responsables, qui ne savent ou ne veulent trancher des affaires tellement graves qui nous rappellent cette ambiance du Far West, hélas, où il n'y avait aucune justice, si ce n'était celle du plus fort. Voilà, hélas, un FLN pataugeant dans la gadoue par la faute de ses dirigeants! Voilà où il en est aujourd'hui..., sous la férule d'hommes tonitruants pour qui les «affrontements musclés» représentent un signe de bonne santé, alors que pour nous, bien au contraire, cela nous fait frémir tant cette situation se caractérise par des marchandages sordides, dans un climat délétère, où des pratiques incongrues font la une de l'actualité. Tous ces problèmes n'existaient pas, ou pas de cette ampleur, pendant le soi-disant «règne» du parti unique. En tout cas, on ne connaissait pas ces pratiques mafieuses, ni même cette arrogance et cet orgueil qui sont étalés au grand jour. En notre temps, nos militants n'étaient pas humiliés comme ils le sont actuellement, par des «moins que rien» qui squattent, aux yeux de tous, les structures et instances du FLN. Car, le FLN d'antan, le nôtre, fonctionnait avec des principes qui ont, malheureusement, disparu aujourd'hui, laissant place à des conduites d'une autre dimension, d'un autre style. Aujourd'hui, il y a des «chefs» au FLN, mais pas des chefs selon la définition de l'encyclopédie Larousse, dans le sens noble du terme, mais des chefs de clans quand ce n'est pas des chefs de gangs. Ils sont nombreux mais, toujours, inintéressants pour ceux qui maintiennent leur dignité à la hauteur de leur valeur intrinsèque. C'est alors que nous disons, avons-nous le droit de répandre une ribambelle de profanes et d'insignifiants dans les structures d'un parti qui, jusque-là, a eu ses «hauts» et ses «bas», mais qui n'a jamais possédé une armée de ce genre qui ne pourra lui rendre son prestige d'avant? Avons-nous le droit d'ignorer, cyniquement, de bons dirigeants que nous avons sinistrement liquidés, pour se rabattre sur de «nouveaux» militants, dont la seule et unique prétention est d'accaparer des situations de rente, plutôt que de remplir des missions où il est très dur d'arpenter les chemins qui montent et de produire ce que le peuple est en droit d'espérer? Ainsi, les responsables d'aujourd'hui, entre les mains desquels se trouve bloqué le FLN, doivent avoir ce courage pour conclure, s'ils ont un tant soit peu de vaillance politique, au constat d'échec d'une période, malheureusement placée sous leurs auspices, parce qu'ils n'ont pu se dresser contre toutes sortes de dérives, qui ont provoqué des ravages au sein de l'économie nationale. Oui, nous le maintenons, encore fortement, lorsque nous lisons en bons caractères, écrits par des plumes sérieuses, que dans plusieurs domaines, force est de constater qu'il n'y a pas de feuille de route, qu'il n'y a pas d'initiative, qu'il n'y a même pas de débat, au moment où les actuels chefs du FLN se targuent, exagérément, que tout se fait sous leur responsabilité, à travers le programme du Président. Est-elle vraie, cette dernière prétention? Nous ne le pensons pas, vraiment, connaissant notre «monde» et de quelle pâte est-il façonné. Entre hier et aujourd'hui Après tout cela, l'on se demande: où sommes-nous par rapport au FLN d'hier qui se réunissait autour de grands dossiers, lors de ses sessions du Comité central, pour les étudier et, enfin, donner sa conception, en des recommandations qui faisaient l'objet d'application et de suivi au niveau de l'Exécutif et des autres secteurs qui en avaient la charge. C'est vrai qu'aujourd'hui, le FLN n'est pas seul dans le champ politique, mais a-t-il fait au moins l'effort pour étudier et présenter ses conclusions concernant les importants dossiers du pays? Ainsi, et par déduction: avons-nous un déficit de «cadres» et d'Hommes audacieux et compétents, pour faire tourner notre machine? Non! Alors, cette histoire de gens valables et d'«Hommes d'Etat», c'est donc du pipeau, pour tous ceux qui ont le sens du jugement! Car, franchement, nous sommes-nous donné la peine de les dénicher là où ils sont et non pas de choisir les malléables et corvéables pour en faire des serpillières et arriver au résultat que nous connaissons? «C'est l'un des rares pays au monde où le peuple est plus fort que ceux qui le dirigent», proférait un des leaders de l'opposition en Algérie. Pour tout ce constat - et là je conjugue mes verbes à la première personne du singulier, en prenant toutes mes responsabilités - je ne peux rester dans l'expectative pour n'écrire que lorsqu'une grâce vient épousseter le FLN pour lui permettre de se refaire et recouvrer ce qu'il a perdu depuis des lustres. J'écris sans hésiter ce qu'il est aujourd'hui, entre les mains de responsables irresponsables, inefficaces, qui lui ont fait consommer le peu de crédit qui lui restait. Ceux-là sont partout. Ils sont dans l'Exécutif, dans les assemblées élues et dans d'autres institutions de souveraineté, faisant piètre figure et «abdiquant volontiers leur fierté au pied d'avantages servis». Ces derniers termes sont d'un journaliste. Je les retiens, car ils dénoncent la décrépitude dans laquelle nous nous enfonçons. Cela me ramène à un autre constat, qui me fait dire sans risque de me tromper, que nos responsables, notamment les décideurs, ont fait de grosses erreurs de casting. De cela, ils ne pourront demain, si facilement et simplement, se désavouer. Mais, les militants qui n'aiment pas ces réquisitoires qui regorgent de charges et de reproches - croyez-moi -, souhaitent être mieux représentés. Ils le demandent à cor et à cri, parce qu'au niveau de leur parti, ils connaissent de grands cadres, hautement plus expérimentés et sincèrement plus dévoués et capables de diriger de grands secteurs et d'importantes entreprises. Ils savent où sont les Hommes (en majuscule) qui peuvent combler des postes marquants, dont la plupart, malheureusement, sont habités par des hommes (en minuscule) qui affectionnent la culture de l'oubli, voire du mépris, dans ce «tribunal» de l'inquisition qu'est devenu notre système. Il faut pour cela, procéder à une grande réforme et pourquoi pas à une refondation courageuse du système. Je l'ai écrit dans un ouvrage et je tiens énormément à ce que notre FLN, par le biais de cette vaillante décision, salutaire pour le pays, revienne entre de bonnes mains, dans la dignité et les principes. Cela dit, ce n'est pas une demande d'emploi que je présente à travers ce papier, loin s'en faut - mon avenir politique est derrière moi -, c'est tout juste un appel aux militants pour se ressaisir et se mobiliser derrière un FLN qui devrait ratisser, très large, pour ne plus être l'otage d'une politique de consensus, au profit de personnes. Ce FLN qui sera dirigé, nous le souhaitons, par des jeunes, doit être nécessairement propice à un autre mode de gestion, qui favoriserait la véritable alternance, pour l'émergence de responsables compétents et de nouvelles formules de participation au développement du pays. Ainsi, il agira, incontestablement, en faveur d'une véritable libération des initiatives qui, elles, seront le facteur déterminant pour un décollage économique, efficient et rentable. Pour ce faire, il devrait se débarrasser des lobbys politiques qui sont devenus les détenteurs exclusifs du pouvoir en son sein et là, la démocratie sera effective et le débat d'idées sera hautement plus intelligent, fructueux, généreux et enrichissant. (*)Ancien membre du Secrétariat permanent du Comité central du FLN Ancien ministre