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Visa pour la culture de l'autre
RENCONTRE AUTOUR DE LA TRADUCTION ET LA LITTERATURE
Publié dans L'Expression le 01 - 11 - 2010

Bien plus qu'un simple moyen de transmission de la connaissance, la traduction dans le domaine littéraire est une ouverture sur la culture de l'autre...
Peut-on admettre et accepter la traîtrise? Absolument! La réponse, ainsi donnée, peut paraître quelque peu étrange, voire même subversive. Toutefois, il ne s'agit pas là d'amour, d'amitié ou encore de politique, mais de littérature et plus précisément de traduction dans le domaine littéraire.
A bien voir, la traîtrise pourrait être admissible, appréciable et parfois même nécessaire. C'est ce qui a été confirmé d'ailleurs par plusieurs auteurs-traducteurs lors d'une rencontre ayant pour thème «La traduction et la littérature», organisée vendredi dernier, en marge de la 15e édition du Salon international du livre d'Alger à l'esplanade du complexe Mohamed-Boudiaf. «Traduttore traditore...», dira d'emblée l'auteur de Choc des civilisations dans un ascenseur Piazza Vittorio, Amara Lakhous. Ces deux paronymes italiens pourraient être traduits tout simplement par «le traducteur est traître». Aussi bien arabophone qu'italophone, Amara Lakhous traduit lui-même ses romans. «Je ne suis pas un traducteur au sens propre du terme...j'écris en arabe et en italien et mon projet est d'arabiser l'italien et d'italianiser l'arabe.», a-t-il précisé lors de son intervention. «Je ne traduits pas mes textes. Je les trahis. Etant traducteur de mes propres romans, je me sens libre dans le choix des mots et dans la façon de les adapter», a-t-il poursuivi. De son côté, Mohamed Sari a mis l'accent sur la nécessité de prendre en compte «les nombreuses subtilités de la langue de laquelle et vers laquelle on traduit», a-t-il précisé. Professeur à l'université d'Alger, M.Sari a précisé que «les idiomes ne sont pas traduisibles. Il faut donc trouver l'équivalent». Cet intervenant a fait également remarquer à l'assistance que de nombreux auteurs algériens effectuent eux-mêmes une première traduction de leurs textes. Il s'en explique: «L'écrivain effectue une première traduction en écrivant dans la langue de l'autre.» Preuve en est, le recours de certains littérateurs à leur langue d'origine quand ils sont dans l'incapacité d'évoquer certaines sensations ou objets dans la langue de l'autre. François Nkeme, auteur et éditeur camerounais a, quant à lui, abordé les nombreux problèmes que rencontre la traduction littéraire dans son pays. Il a évoqué, notamment le «très grand nombre de dialectes» qui existent au Cameroun. «Le problème qui se pose est: dans quel dialecte va-t-on traduire?», a-t-il estimé. Abondant dans le même sens que Amara Lakhous, Justine Mintsa, maître assistante à l'université de Libreville au Gabon, a fait observer qu'«il faut que le traducteur soit traître à un certain degré». «Deux langues n'ont pas les mêmes approches ni les mêmes concepts, donc le traducteur est obligé de trouver des tournures de phrases pour exprimer la réalité. Il y a aussi des onomatopées qui ne peuvent pas être transcrites», explique-t-elle. L'intervenante a néanmoins précisé que la «traduction doit à la fois instruire, cultiver, plaire et séduire».


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