L'intervention du ministre marocain des Affaires étrangères devant les parlementaires européens ressemble à un naufrage. Le chef de la diplomatie marocaine qui s'est montré très courroucé après le vote de la résolution condamnant l'attaque menée par les forces d'occupation marocaines contre le camp de Gdeim Izik, a fini par mettre de l'eau dans son vin. «Les relations entre le Maroc et l'Union européenne sont ancestrales et il y a une prise de conscience des Etats membres sur l'importance de ce partenariat stratégique, le Maroc étant en avance sur beaucoup d'autres pays pour s'ouvrir et pour prendre des engagements aux niveaux politique, démocratique et économique. Ces relations ne doivent pas souffrir d'une situation née dans le cadre d'un stratagème ourdi par les ennemis du Maroc», a déclaré le ministre marocain des Affaires étrangères qui a pris la parole le 1er décembre 2010 devant la Commission des Affaires étrangères du Parlement européen. Faisant référence à l'assaut sanglant du camp de la liberté qui a fait des dizaines de morts et quelque 4500 blessés selon un bilan provisoire livré par le Front Polisario, Taïeb Fassi Fihri a fait dans la victimisation et la diversion en soutenant que ces dramatiques événements font partie d'un complot monté par les parties adverses (l'Algérie et le Polisario Ndlr) visant à bloquer les négociations autour du Sahara. «Le Maroc ne demande pas la complaisance, et encore moins le soutien inconditionnel de l'Union européenne. Nous demandons, par contre, une lecture lucide et sereine, une analyse et des conclusions pertinentes des événements de Laâyoune de la part du Parlement européen, ce qui ne s'est malheureusement pas reflété dans la résolution partiale et injuste, adoptée précipitamment par cette institution», a-t-il ajouté sur un ton à la fois conciliant et fataliste. Le revers subi par la diplomatie marocaine semble définitivement consommé! L'intervention du ministre marocain des Affaires étrangères ressemble à un naufrage. Ses arguments ne tiennent plus la route. Ils sont hors sujet. Censé s'expliquer sur l'assaut donné le 8 novembre 2010 à l'aube contre le camp de toile de Gdeim Izik et qui s'est transformé en une véritable chasse à l'homme dans les ruelles de la ville d'El Aâyoune occupée, le chef de la diplomatie marocaine esquive maladroitement la véritable question. Comme pour fuir ses responsabilités. «Le Maroc, non seulement revendique la vérité, mais l'exige, afin que le Parlement européen ne continue pas à aller à l'encontre de la dynamique des Nations unies et à se faire piéger par des personnes politiquement intéressées et nationalement engagées. Des personnes qui ont, depuis longtemps, choisi d'épouser aveuglement la thèse des ennemis du Maroc et ne portent jamais un regard objectif sur la position des différentes parties de ce conflit artificiel», a poursuivi aveuglément Fassi Fihri. Le Royaume chérifien se voile la face comme à l'accoutumée et adopte une position défensive qui explique l'insoutenable statu quo dans lequel est plongé le conflit du Sahara occidental. Une stratégie qui fait les affaires du pouvoir marocain. Taïeb Fassi Fihri qui avait décidé d'aller défier les parlementaires européens chez eux pour «démontrer le caractère partial, injuste et déséquilibré de la résolution» comme il l'avait déclaré dans une interview publiée le 27 novembre 2010 par le quotidien espagnol El Pais, s'est finalement dégonflé en plus d'avoir fait chou blanc. «Nous n'allons pas transiger sur cette question, qui sert nos adversaires (le Polisario et l'Algérie, Ndlr) parce que nous sommes en état de guerre», avait assuré sur un ton agressif et belliqueux le chef de la diplomatie marocaine au lendemain de l'adoption de la résolution, condamnant son pays, adoptée par les parlementaires de Strasbourg. Depuis, le vent à de nouveau tourné en défaveur du Makhzen. Un communiqué du comité des Affaires étrangères du Parlement européen a souligné la nécessité de mettre en oeuvre un mécanisme de protection des droits de l'homme dans les territoires occupés du Sahara occidental alors que les députés espagnols ont appelé jeudi le gouvernement de José Luis Zapatero à «condamner» l'attaque marocaine contre les Sahraouis du camp de Gdeim Izik. Sale temps pour la diplomatie marocaine.