Alors que l'UA planche sur la crise ivoirienne depuis des mois, la voilà rattrapée par d'autres défis que sont les changements brutaux induits par les révolutions en Tunisie et en Egypte qui font vaciller le pouvoir au pays des Pharaons. Une trentaine de chefs d'Etat africains tentaient hier de mettre un terme à l'enlisement de la crise ivoirienne, au premier jour d'un sommet à Addis-Abeba qui célèbrera également l'avènement attendu d'un nouvel Etat, le Sud-Soudan. «Je déclare ouverte la 16e session ordinaire de l'Assemblée de l'Union africaine», a déclaré le président en exercice de l'organisation, le malawite Bingu wa Mutharika. Le sommet, qui s'achève aujourd'hui, devrait entériner les décisions prises vendredi et samedi sur la Côte d'Ivoire, lors de réunions préparatoires, et permettre aux chefs d'Etat, membres de l'UA, de parler d'une seule voix pour résoudre l'imbroglio né du scrutin présidentiel contesté du 28 novembre. L'UA va mettre en place un panel de cinq chefs d'Etat représentant les différentes régions du continent, chargé de présenter d'ici un mois des décisions «contraignantes». Il s'agit ainsi d' «amener Alassane Ouattara à exercer la réalité du pouvoir» dans le pays «par la négociation», a précisé samedi le président de la Commission de l'UA, Jean Ping, ajoutant que son organisation considérait toujours M.Ouattara comme le vainqueur du scrutin qui l'a opposé au président sortant Laurent Gbagbo. Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, présent à Addis-Abeba, a appuyé la création de ce panel, un soutien assorti d'une série de principes pour l'encadrer. Tout en écartant fermement l'idée avancée par M.Gbagbo d'un recompte des voix, qui serait «une grave injustice», M.Ban a «appelé le président Ouattara à former un gouvernement d'union nationale». Ce dernier s'est félicité hier de ces prises de positions et a appelé le panel à vite conclure ses travaux. Certains pays africains comme l'Afrique du Sud ou l'Ouganda ont paru ces derniers jours revenir sur l'intransigeance affichée jusqu'à présent par l'UA envers M.Gbagbo, au nom de la nécessité de trouver une issue pacifique à la crise. Sur une note plus optimiste, l'organisation continentale s'est félicitée du déroulement du référendum d'autodétermination au Sud-Soudan et de l'élection à la tête de la Guinée du premier président démocratiquement élu depuis l'indépendance du pays en 1958, Alpha Condé. M.Ping a ainsi rendu un «hommage appuyé à la Guinée qui a su organiser des élections démocratiques» avant de lancer un «bon vent à la Guinée!». «Ma présence à cette tribune consacre le retour de la Guinée au sein des Nations africaines», s'est réjoui M.Condé. Le Sud-Soudan s'est prononcé à 98,83%, selon des résultats préliminaires complets annoncés hier, en faveur de l'indépendance qui doit être proclamée en juillet. M.Ping a appelé le Nord et le Sud-Soudan à «redoubler d'efforts pour préserver la paix». L'UA paraît en revanche devoir se cantonner à un rôle de spectateur des manifestations populaires qui ont fait fuir le président tunisien Zine El Abidine Ben Ali, et qui menacent le régime du président Hosni Moubarak en Egypte. Le secrétaire général de l'ONU a, pour sa part, lancé à la tribune un appel à «la retenue, à la non-violence et au respect des droits fondamentaux» en Egypte, où au moins 102 personnes ont été tuées depuis le début, mardi, des manifestations contre le régime. L'UA a par ailleurs désigné le président équato-guinéen, Teodoro Obiang Nguema, comme nouveau président pour un an en dépit des critiques des organisations des droits de l'Homme sur la répression et la corruption qui règnent selon elles dans ce petit pays aux importantes réserves pétrolières. L'invité d'honneur de ce sommet est le président français, Nicolas Sarkozy, qui a profité de sa visite hier à Addis-Abeba pour plaider pour une meilleure régulation des marchés mondiaux, une des priorités de la présidence française du G8 et du G20. «Le président Sarkozy est un vrai ami de l'Afrique. Nous lui sommes reconnaissants d'avoir trouvé le temps d'être avec nous pour ce sommet», a déclaré Bingu wa Mutharika à l'adresse du chef d'Etat français.