Dans un geste témoignant d'une ultime désespérance, un éboueur licencié s'asperge d'essence et tente l'irréparable... Presque une heure avant le début du rassemblement prévu par les chômeurs devant le ministère du Travail, la ruelle où se trouve l'accès principal de ce département au quartier Mohamed Belouizdad (ex-Belcourt) était complètement quadrillée par les forces de sécurité. 42 ans, Ferhani est venu de Tébessa pour assister à la manifestation dont il a entendu parler, depuis quelques jours, via la presse nationale. «Je n'ai aucun contact avec les organisateurs, j'ai lu que les chômeurs allaient organiser un rassemblement. Alors je suis venu», indique-t-il tout de go. «Cela fait sept ans que je viens à Alger...assez régulièrement...j'ai déposé plusieurs dossiers au niveau de la Caisse nationale d'assurance chômage (Cnac) mais ça n'a rien donné...», affirme-t-il. Alors il essaie tant bien que mal de survivre en recourant à des petits métiers. Dans un geste témoignant d'une ultime désespérance et d'un sentiment accru d'injustice, ce quadragénaire a tenté de mettre fin à ses jours en s'immolant devant le siège du ministère. Peine perdue, la police va l'embarquer et le relâcher le soir même. «Ici, on meurt en silence...je n'ai plus de carte nationale, je l'ai brûlée», crie-t-il. Quelques minutes plus tard, d'autres chômeurs venant de Ouargla, Laghouat, Chlef, Aïn Defla ainsi que d'autres wilayas arrivent devant le ministère en scandant: «One, two, three où va l'Algérie?», «Où sont les responsables du scandale Sonatrach?» «Les khoubzistes bara!», «Donnez-nous du travail!», «Thamechna et tahguerna (on a été marginalisés et lésés)». De violents affrontements ont eu lieu entre les forces de police et les manifestants. L'arrestation de trois d'entre eux par les forces de sécurité présentes en grand nombre, fera monter la tension. Les trois chômeurs seront libérés quelques minutes après. Constatant la détermination des chômeurs encadrés par la Coordination nationale pour la défense des droits des chômeurs, le ministère du Travail décide de recevoir une délégation afin que celle-ci puisse exposer la plate-forme de revendications de leur organisation. Un travail digne, une allocation chômage de 50% du Snmg et une nouvelle politique d'emploi dont la réhabilitation des entreprises sont, entre autres, les revendications que ces chômeurs voulaient exposer aux responsables du ministère du Travail. Une délégation de quatre personnes sera reçue au département de Louh pour en discuter. «Ils nous ont dit: «on vous a compris»...en réalité, c'est un premier contact, ils ne nous ont rien promis», affirme Samir Laribi, porte-parole de la Coordination nationale pour la défense des droits des chômeurs. «Nous avons rencontré des cadres du ministère qui ont reconnu que nos exigences sont légitimes. Nous voulons du travail et de la dignité. Nous réclamons l'arrêt des licenciements abusifs et des mauvais traitements auxquels sont confrontés les chômeurs algériens», ajoute Tahar Belabbès du Collectif des chômeurs du Sud. Quelques temps auparavant, vers 13 heures, un éboueur licencié s'est aspergé d'essence. Cette énième tentative de suicide par le feu sera empêchée grâce à l'intervention rapide des présents.