Décidée par l'opposition et interdite par le pouvoir, la marche prévue aujourd'hui à Alger suscite beaucoup d'appréhensions. Citoyens, politiciens ou simples observateurs de la scène politique nationale, tout le monde souhaite que la situation ne dégénère pas et que la manifestation garde «son caractère pacifique», comme l'espèrent les initiateurs. Cette appréhension est liée à une conjoncture particulière qui s'est installée au lendemain de l'annonce de l'organisation d'une marche par la Coordination nationale pour le changement et la démocratie. Dès lors, la mobilisation s'est généralisée. Cela aussi bien dans les rangs des organisateurs de la marche que dans les rangs du pouvoir. Comme première réaction, le gouvernement a rappelé que les marches sont interdites au niveau de la capitale. Il y a quelques jours, la wilaya d'Alger a refusé la demande d'autorisation de marche et propose à ses initiateurs une des salles de la capitale, selon un communiqué de la wilaya rendu public le 7 février dernier. «En application des textes réglementaires en vigueur, un refus a été notifié aux auteurs de cette demande», indique la wilaya. «La manifestation peut être tenue dans l'une des différentes salles de la capitale, y compris la Coupole du complexe olympique Mohamed-Boudiaf d'une capacité de 10.000 places», ajoute le communiqué. Cette décision n'a pas démobilisé la coordination qui a maintenu son action en dépit de l'interdiction. A l'approche du jour J, la tension est montée d'un cran. Pour l'occasion, un impressionnant dispositif de sécurité dissuasif a été mis en place par les autorités au niveau de la capitale. Des dizaines de milliers de policiers antiémeute ont rejoint Alger durant les dernières 48 heures. L'objectif est d'empêcher les manifestants d'emprunter l'itinéraire qui mène de la place du 1er-Mai à la place des Martyrs. Entre la mobilisation des forces de l'ordre et la détermination des manifestants, le risque de débordement n'est pas à écarter. Les manifestants seront opposés à des centaines des policiers. Une simple dérive peut conduire à un grand débordement. Autrement dit, une petite étincelle peut provoquer une grande explosion. La dernière marche organisée par le RCD à Alger renseigne de fort belle manière sur le risque que comporte la manifestation d'aujourd'hui. Des échauffourées y ont eu lieu entre les services de l'ordre et les militants du Rassemblement pour la culture et la démocratie. Des dizaines de blessés ont été recensés dans les deux camps. En termes de mobilisation, la marche prévue pour aujourd'hui serait plus étoffée que celle organisée le mois dernier par le RCD, dans la mesure où elle regroupe plusieurs organisations, partis politiques, syndicats, associations estudiantines et autres comités de quartiers. La conjoncture nationale et même régionale sont également des facteurs à l'origine de cette appréhension, d'où l'impératif de faire très attention aux dérapages. C'est ce qui a, d'ailleurs, poussé les autorités concernées à renforcer le dispositif de sécurité.