L'Iran qui assure la présidence de l'Opep n'a pas apprécié la décision de Riyadh de mettre sur le marché 700.000 barils par jour pour pallier la défection du pétrole libyen. Il n'y a pas eu consensus autour de cette initiative. Riyadh a vraisemblablement fait cavalier seul. Téhéran n'a pas apprécié. Elle l'a fait savoir avec la manière. Le ministre du Pétrole iranien est contre toute décision unilatérale d'augmentation de la production de l'Opep. Il a, avec tact, rappelé à l'ordre le Royaume wahhabite ainsi que l'ensemble des pays membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole. «Les membres de l'Opep n'ont pas besoin de prendre de décisions hâtives et unilatérales», a déclaré Massoud Mir Kazemi. Le ministre iranien du Pétrole a réagi à la décision de l'Arabie Saoudite qui a augmenté sa production pour compenser une éventuelle pénurie mais surtout faire face à la flambée des prix provoquée par la crise libyenne. Le baril de Brent de la mer du Nord a frôlé la barre des 120 dollars le 24 février. Il faut souligner que la mesure prise par Riyadh n'a pas été décidée dans le cadre d'une réunion extraordinaire de l'Opep dont aurait pu découler une telle mesure. «Il n'y a pas besoin d'augmenter la production annuelle, car de jour en jour, le volume de pétrole stocké en mer et sur terre augmente», a fait remarquer le ministre iranien du Pétrole selon une dépêche répercutée par l'agence de presse officielle iranienne, Irna. «Si un pays évoque une hausse de la production, on ne sait pas si cette hausse compensera la chute de la production en provenance de Libye. Il vaut mieux pour les membres de l'Opep faire preuve de retenue, et ne pas être hâtifs», a poursuivi Massoud Mir Kazemi. La présidence tournante de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole est revenue aux Iraniens depuis le début de l'année 2011. La République islamique d'Iran a accédé à un voeu, vieux de trente-six ans. Il s'est réalisé à l'occasion de la tenue de la 157e réunion de l'Opep, qui a eu lieu le 14 octobre 2010 dans la capitale autrichienne. Cette consécration, même, s'il elle revêt un aspect symbolique aux yeux des observateurs, représente concrètement une véritable bouffée d'oxygène sur le plan politique pour la République des mollahs qui fait l'objet de sanctions depuis qu'elle a mis en oeuvre son programme de développement nucléaire. Téhéran est soupçonnée par la communauté internationale (Etats-Unis, Grande-Bretagne, Allemagne, France) de vouloir se doter de l'arme nucléaire. Pour rappel, la résolution votée au mois de juin 2010 reprend et élargit le champ des sanctions déjà adoptées à trois reprises par l'Organisation des Nations unies, en décembre 2006, mars 2007 et mars 2008. Le texte prévoit notamment, que la République islamique d'Iran ne pourra investir à l'étranger dans certaines activités sensibles comme par exemple les mines d'uranium. L'Arabie Saoudite irait même plus loin. En effet selon des documents diplomatiques américains obtenus par le site WikiLeaks, le roi Abdallah aurait appelé «fréquemment les Etats-Unis à attaquer l'Iran pour mettre fin au programme nucléaire du pays». Le souverain wahhabite aurait aussi conseillé aux Américains «de couper la tête du serpent» en faisant allusion à l'Iran, d'après des propos échangés entre l'ambassadeur saoudien aux Etats-Unis, Adel al-Jubeir, et son homologue américain en Irak, Ryan Crocker, le 17 avril 2008. Ces révélations sont-elles pour autant suffisantes pour étaler au grand jour une probable animosité entre Téhéran et Riyadh à travers le cavalier seul de l'Arabie Saoudite au sein de l'Opep? L'Iran, un des faucons du cartel, qui préside l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, ne se laissera pas faire. Son ministre du Pétrole vient de le lui rappeler. La République islamique ne fera pas carpette.