Les organisations criminelles font appel à des experts financiers et des avocats pour «légaliser» leur action. L'étendue du territoire national et le contexte régional sont des facteurs qui exposent l'Algérie aux méfaits du crime organisé transnational, et l'interpellent dans la lutte contre ce genre de crime, a indiqué hier, à Alger, un responsable au ministère de la Justice. Mokhtar Lakhdari, directeur des affaires pénales et des grâces au ministère de la Justice, a expliqué que les crimes dominant en Algérie sont ceux de type «classique», mais l'étendue du territoire et des frontières et le contexte régional, a-t-il observé, sont des «facteurs favorables» à l'expansion du crime organisé transnational. Dans une déclaration en marge d'un atelier de formation sur le thème «Crime organisé et corruption publique», M.Lakhdari a souligné «l'effort continu» déployé par l'Algérie pour développer les capacités de la justice et des services de police judiciaire à lutter contre le crime organisé transnational qu'il a qualifié de phénomène «très complexe». Il a relevé que le crime organisé en Algérie est, en premier lieu, lié à des activités de contrebande, de trafic de drogue, de vol de voitures et d'immigration clandestine. Le crime organisé transnational est «le plus dangereux de toutes les formes de criminalité» et «ses répercussions sur la société sont les mêmes que celles des crises politiques et sociales», a-t-il estimé. Concernant le lien existant entre le crime organisé et la corruption, M.Lakhdari a relevé que «les deux ont une seule finalité, qui est le gain facile et illicite». «Dès qu'on parle de corruption liée au monde des affaires, on est dans le crime organisé transnational», a-t-il dit, précisant que, souvent, les organisations criminelles font appel à des experts financiers, des banquiers, des avocats et des notaires pour faire en sorte que leur action ait une apparence de légalité. «En parlant de corruption, nous ne parlons pas d'un acte isolé, mais de tout un montage financier devant permettre surtout de recycler de l'argent sale», a-t-il indiqué. Sur l'objectif de l'atelier de formation auquel ont pris part 47 magistrats, M.Lakhdari a estimé que «la formation des magistrats est aussi importante que l'indépendance de la justice». Il a ainsi estimé impératif pour un magistrat d'avoir suffisamment de compétence pour maîtriser tous les aspects liés au commerce international, aux transferts de fonds, à la gestion des entreprises et à tous les aspects qui sont en relation avec la criminalité économique et financière. Il a souligné, dans ce contexte, que le choix de magistrats américains pour encadrer l'atelier est justifié par l'expérience des Etats-Unis qu'il a qualifiée de «pionnière» en matière de crime organisé. Ce pays a connu le crime organisé depuis les années 20 du siècle dernier et adapté sa législation et ses techniques d'investigation en conséquence, a-t-il rappelé. L'atelier est aussi une occasion de «découvrir l'expérience américaine à travers des cas concrets, des cas pratiques» et de «former les magistrats à lutter contre le crime dans le strict respect de la loi et de la présomption d'innocence et des principes qui régissent un procès équitable», a-t-il ajouté. «Il s'agit d'outiller les magistrats pour être préparés à ce genre de crime, car le plus important est que les magistrats fassent leur travail, ne subissent pas de pression et ne soit pas influencés», a-t-il conclu.