Les derniers jours sur la Croisette sont animés par la polémique suscitée par le réalisateur Lars von Trier. Après ses propos douteux sur le régime nazi, le festival a publié un communiqué: «Le Festival de Cannes s'est ému des propos tenus par Lars von Trier en conférence de presse ce matin à Cannes. Il l'a donc invité à s'expliquer sur la teneur de ses déclarations. Le cinéaste précise qu'il s'est laissé entraîner à une provocation. Il présente ses excuses.». Ses deux actrices Charlotte Gainsbourg et Kristin Dune lui avaient aussi demandé des explications avant de gravir les marches du tapis rouge à ses côtés lors de la projection officielle. Les choses auraient pu en rester là si le cinéaste n'avait poursuivi ses diatribes, ce qui a provoqué son exclusion de la manifestation: «Le Conseil d'administration condamne très fermement ces propos et déclare Lars Von Trier persona non grata au Festival de Cannes, et ce, avec effet immédiat.» Situation inédite à Cannes, le film reste toutefois en compétition. Ce qui laisse l'entière responsabilité au jury de le primer ou non.Cette affaire embarrassante coïncide avec la présentation en compétition du film américain du cinéaste italien Paolo Sorrentino, Prix du Jury à Cannes en 2008 pour Il Divo. This must be the place raconte la «traque» par Cheyenne, une vieille rock star usée par la vie, du bourreau nazi de son père. A la mort de son géniteur, qu'il n'avait pas revu depuis 30 ans, Cheyenne découvre ses carnets et décide de remonter le fil des enquêtes paternelles afin de trouver enfin ce criminel de guerre caché depuis des années aux USA. Ce voyage à travers les Etats-Unis, au cours duquel il rencontre l'épouse du nazi, un professionnel de la traque à la Simon Wiensenthal, la petite-fille du criminel et enfin le bourreau lui-même, est parallèle à un voyage intérieur qui va lui redonner la sérénité. C'est souvent drôle, grâce à Cheyenne (Sean Penn irrésistible), à son allure punk gothique et à ses répliques cinglantes et insolites. C'est aussi une belle leçon de tolérance et une réflexion sur les rapports parents-enfants. Sean Penn pourrait bien rempoter un prix d'interprétation pour la subtilité de son jeu.Pedro Almodovar a surpris avec La peau que j'habite adaptation d'un roman de Thierry Joncquet, Mygale. Histoire macabre d'un chirurgien esthétique qui séquestre une femme pour tester une nouvelle peau qu'il a lui-même créée. Une invention qui aurait peut-être sauvé son épouse, morte dans un accident douze ans plus tôt. On y retrouve ses thèmes favoris: désir, sexe, pulsion auto-destructrice, identité, amis traités façon série B. Almodovar, c'est une histoire d'amour déçue avec Cannes: présent à chaque nouveau long métrage mais jamais de Palme d'Or malgré des oeuvres brillantes comme Tout sur ma mère en 1999 ou Volver en 2006. Peut-être que la malédiction sera rompue avec La Piel que Habito, thriller stupéfiant d'habileté avec la présence brillante d'Antonio Banderas en as du scalpel.