Deux ou trois phrases du programme présenté par le chef du gouvernement devant les députés, étaient, à elles seules, tout un programme. Celui ayant trait aux objectifs audiovisuels des autorités. En annonçant le projet de création de nouvelles chaînes de télévision publiques, le gouvernement exclut, de fait, le secteur privé de ce créneau. Une chaîne de télé est composée de quoi? Premièrement, il faut de l´argent, beaucoup d´argent. Deusio, il faut disposer de production télévisuelle (films, séries, émissions,...). Tertio, il faut des moyens techniques et humains très performants. De tout cela, nous n´avons, aujourd´hui, que la première exigence, c´est-à-dire l´argent. Pas forcément entre les mains des professionnels de l´audiovisuel. C´est pourquoi des alliances seront inévitables. Comme elles se sont faites pour la presse écrite où des «financiers» venus d´horizons aussi divers que la restauration rapide, l´import-import où de simples prête-noms se sont retrouvés à diriger des journaux. L´ouverture trop rapide et sans préparation de la presse en 1990 a eu l´effet d´une pompe aspirante qui a attiré tous les universitaires sans emploi vers un métier qui n´était pas forcément le leur. Le résultat ne s´est pas fait attendre. Des tribunaux spéciaux ont dû être créés pour pouvoir faire face au nombre d´affaires liées à la diffamation. N´était la précipitation du début des années 90, il eut fallu mettre en oeuvre d´abord une sérieuse réforme de l´éducation nationale en général et de l´enseignement supérieur en particulier. Mettre en adéquation le Code de l´information, notamment dans sa partie relative au droit de créer un journal ou même une revue, et veiller à sa stricte application. Imaginons, un instant, la catastrophe si on ouvrait le champ audiovisuel au privé dans les mêmes dispositions qui ont prévalu pour la presse écrite. Ce serait une affaire de gros sous sans plus. Avec une production cinématographique nationale quasi nulle, chacun remplirait sa grille comme lui dictent ses intérêts. Financiers ou autres. Les uns nous gaveront de séries égyptiennes, d´autres de films américains de série B, certains pencheront plus vers le cinéma indien, et on en passe. Ne parlons pas du traitement de l´info au petit écran qui n´a rien à voir avec celle de la presse écrite et qui nécessite une tout autre maîtrise. Même la création d´un CSA en amont ne servirait à rien dans de telles conditions. Mais si le temps est mis à profit pour former et mieux se préparer à l´ouverture au privé, en prenant appui sur ces nouvelles chaînes publiques annoncées, alors et, à défaut de zéro dégâts, ceux-ci seront néanmoins limités. Pour l´instant, rien de tout cela n´est à l´ordre du jour, hélas!