Les patrons sont-ils devenus des syndicalistes? L'année en cours a connu un événement unique en son genre. Les syndicats et patrons sont montés au créneau, posant les mêmes problèmes et avec les mêmes appréhensions. Le secrétaire national de l'Ugta, chargé des conflits sociaux, Boualem Bouzidi, joint par téléphone, n'a pas trouvé étrange ce fait. «C'est la preuve qu'on n'a pas tort dans nos revendications», a-t-il déclaré en ajoutant que «le point principal qui unit les patrons au syndicat n'est autre que la protection de la production nationale et des richesses du pays (...) Cela prouve que quelque chose ne va plus dans les réformes qui montrent leurs limites», a-t-il soutenu. Ce ne sont plus les réformes elles-mêmes qui inquiètent, mais l'inadéquation entre le rythme des réformes institutionnelles par rapport à l'échéance de l'ouverture de l'économie nationale aux zones franches et à l'économie de marché qui se réduisent de jour en jour avec les engagements internationaux de l'Etat avec l'OMC et l'UE. D'ailleurs, dans son discours d'ouverture de la session du Cnes, le Chef du gouvernement, Ali Benflis, n'a pas nié la légitimité des appels du patronat. Il a même affiché sa volonté d'appuyer l'idée d'un pacte social dont la forme n'est pas encore définie. A ce propos, le président de la Confédération générale des opérateurs algériens qui s'est félicité que le rapport du Cnes ait confirmé les conclusions de leur analyse, a déclaré que «le gouvernement n'a pas d'autre choix s'il veut sauver l'économie nationale». Toutes les organisations patronales tirent la sonnette d'alarme. Pour M.Yousfi, «le salut des réformes ne peut être bénéfique que s'il passe par les réformes fiscale et bancaire, le marché informel, le dossier du foncier industriel, et le rôle de l'Etat dans la protection du produit algérien face à l'avalanche des produits importés, souvent contrefaits». C'est justement les mêmes revendications que l'Ugta qui cherche à sauver les meubles de la maison Algérie. L'Etat devra-t-il chercher une solution avec le syndicat et les patrons? Tout porte à croire qu'il sera contraint de le faire. Comme il est probable que toutes les parties seront amenées faire des concessions, mais jusqu'où? Le constat du Cnes est venu conforter les thèses du patronat tout comme celles du syndicat. Mais y a-t-il une même approche pour les solutions. L'Etat, tenu par des engagements internationaux, hésite à prendre des risques en matière d'équilibres macroéconomiques. Le patronat estime, pour sa part, qu'il faut soutenir le pouvoir d'achat. Et entre les deux le Cnes considère que l'économie ne doit plus demeurer otage de querelles politiciennes. Il y va de la survie de la nation.