La plainte en appel déposée par les deux soeurs de Larbi Ben M'hidi contre le général Aussaresses a été jugée irrecevable par la Chambre d'instruction de la Cour d'appel de Paris. Le refus d'instruire cette affaire est justifié par des «obstacles juridiques». Lesquels avaient été invoqués en première instance dans une ordonnance signée en janvier dernier par le juge Jean-Paul Valat. Ce dernier s'était appuyé sur l'amnistie générale, décrétée par la loi du 31 juillet 1968 et qui a touché tous les acteurs de la Guerre d'Algérie pour souligner son «incapacité» de procéder à des investigations concernant cette période de l'Histoire de France précisément. Pourtant les plaignantes s'étaient basées sur les propres aveux du général qui a publiquement revendiqué des actes de torture et d'exécution extrajudiciaires, relevant essentiellement des crimes contre l'humanité. Or, dans le droit français, ce genre d'actes criminels est imprescriptible. Pour rappel, la plainte avec constitution de partie civile avait été déposée fin juin à Paris pour «crimes contre l'humanité et assassinat» après la publication, début mai, du livre Services spéciaux, Algérie 1955-1957 du général tortionnaire dans lequel il relatait en détail l'exécution de Ben M'hidi, après son arrestation dans la nuit du 15 au 16 février 1957 par un régiment de parachutistes. Il racontait notamment comment le héros national avait été pendu dans une ferme, à une vingtaine de kilomètres au sud d'Alger. C'est ainsi donc que la justice française, qui n'a ménagé aucun effort pour le jugement et la condamnation de Maurice Papon pour son rôle dans la déportation des juifs de France, classe sans suite le dossier d'un autre criminel qui, contrairement au premier, assume, voire revendique les crimes commis sur des milliers d'Algériens. Il faut croire que comme il existe de bons et de mauvais terroristes, selon une perception toute occidentale, la justice française vient d'établir qu'il existe aussi de bons et de mauvais auteurs de crimes contre l'humanité.