Le combat et la mémoire de Abane piétinés par Ben Bella et Bentobal étaient un élément suffisant pour attiser les passions. Au-delà de sa dimension purement historique, le colloque sur la vie et le combat de Abane Ramdane organisé jeudi à Larbaâ Nath Irathen constituait une aubaine inespérée pour le camp «républicain», en perte de vitesse, pour s'agripper et tenter de récupérer un pan entier de la mémoire collective. En effet, le panel d'invités, triés sur le volet, donne déjà à réfléchir. El Hachemi Cherif, Saïd Sadi et Rédha Malek étaient certainement mus par d'autres visées que celles de répliquer aux déclarations insidieuses portées à la mémoire de Abane par ses «faux frères» d'armes. D'ailleurs, hormis la conférence donnée par Ali Haroun, confinée dans son simple contexte historique, les autres interventions étaient toutes teintées d'envolées politiques et tranchaient littéralement avec la thématique du jour. Ainsi, toute la bonne volonté consentie par les ârchs de Larbaâ Nath Irathen pour réhabiliter la mémoire profanée de l'architecte de la Révolution aura finalement servi de tribune politique à la «fratrie républicaine». L'enjeu était de taille. Le combat et la mémoire de Abane piétinés par Ben Bella et Bentobal étaient un élément suffisant pour attiser les passions. Le silence observé par les autorités officielles face aux attaques répétées de l'inénarrable Ben Bella et la sortie, pour le moins inattendue, de Bentobal, n'ont eu pour effet que de catalyser les convoitises de tous bords. C'est de là qu'a jailli cette idée «ingénieuse» d'organiser un colloque sur l'enfant d'Azzouza à coloration citoyenne, mais à la toile de fond partisane. Ainsi, Abane sacrifié jadis sur l'autel des visées hégémonistes, continue, quarante-quatre ans plus tard, de déranger certains et de susciter les calculs politiciens des autres. Controversé ou adulé, cet homme ne laisse décidément personne indifférent. D'où toute cette agitation effrénée des uns et des autres de se revendiquer de sa lignée ou tout simplement de mettre à son profit son combat.