Il a de nouveau évoqué le Contrat de Rome qui reste, selon lui, porteur d'une solution politique de sortie de crise. Mais “le pouvoir l'avait rejeté, car il était déjà engagé dans une démarche d'arrangement islamo-militaire”. Le premier secrétaire national du Front des forces socialistes (FFS) a répertorié cinq piliers sur lesquels est assis le système politique algérien. “Le système politique, donc le pouvoir, est assis sur cinq piliers qui le font perdurer : il y a d'abord la violence qui lui est consubstantielle, la corruption, le régionalisme, ensuite la sécurité militaire et enfin la rente pétrolière”, a estimé Karim Tabbou. Dans une conférence animée, hier, à la maison de la culture Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou, à l'occasion du 45e anniversaire de la proclamation du FFS, Tabbou est remonté jusqu'à la guerre de Libération nationale pour expliquer sa vision de la genèse de la crise algérienne. Le congrès de la Soummam en 1956, la création du GPRA en 1958, la crise de l'été 1962, les maquis du FFS en 1963, Octobre 1988, sont autant d'escales qui ont structuré l'histoire récente du pays. Aux yeux du conférencier, la Révolution de Novembre n'a pas tenu ses trois promesses. Si la libération du joug colonial s'est concrétisée, la promesse de construction d'un Etat démocratique et social et d'un Maghreb des peuples reste toujours à réaliser. “C'est depuis la prise du pouvoir, par la force, par l'armée des frontières que la violence est érigée en système politique, qui ne fait que reproduire la violence depuis l'Indépendance”, fera remarquer l'orateur. Ce dernier considère Octobre 1988 comme une demande de liberté que le pouvoir a dévoyée par la “contrefaçon politique”. “En 1988, on a voulu sanctionner les Algériens pour avoir revendiqué la démocratie”, a ajouté M. Tabbou qui, se voulant explicite, a rappelé que le pouvoir a mis en place des éléments pièges pour précipiter l'échec du processus démocratique. Ici, l'orateur fait allusion à l'agrément de l'ex-FIS. Le responsable du FFS considère que l'arrêt du processus électoral n'a pas tenu ses promesses, dont celle de sauver la République, puisqu'on a assisté à la restructuration de la dictature depuis lors. Aujourd'hui, “le constat est amer, le tableau de bord du pays est au rouge, il est en danger sur tous les plans”, affirme le conférencier. “Nous sommes le pays qui a organisé le plus d'élections pour moins de démocratie”, ironise-t-il. Car, explique-t-il, l'acte électoral a été tellement dévoyé par “des fraudes récurrentes à l'échelle industrielle” qu'il n'induit plus une représentation politique et sociale. Dans une allusion à la prochaine présidentielle, le conférencier n'a pas manqué de dénoncer les thuriféraires du régime engagés dans une course terrible à la soupe party. Tabbou a de nouveau évoqué le Contrat de Rome qui reste, selon lui, porteur d'une solution politique de sortie de crise. Mais “le pouvoir l'avait rejeté, car il était déjà engagé dans une démarche d'arrangement islamo-militaire”. Un arrangement matérialisé par la concorde civile et, plus tard, la réconciliation nationale, ajoute-t-il encore. Le premier secrétaire du parti socialiste est revenu sur l'initiative des trois personnalités, Hocine Aït Ahmed, Mouloud Hamrouche et Abdelhamid Mehri. “L'initiative des trois personnalités est un choix politique de la nécessité de réengager le pays dans une construction politique et démocratique saine, dont l'acteur principal reste la population”. Yahia Arkat