Pas de changement en Mauritanie. Aucune sortie de crise ne semble encore en vue. L'impasse est totale, malgré le transfert dans son village natal de Sidi Ould Abdallahi, le président déposé par le coup d'Etat du 6 août. Après trois mois de pressions de la communauté internationale, la junte militaire conduite par le général Mohammed Ould Abdel Aziz a lâché du lest en transférant le président déchu du Palais des congrès de Nouakchott, où il était en résidence surveillée, à 250 kilomètres de là, dans son village natal de Lemden où vit encore sa famille. Sidi Ould Abdallahi serait même libre de ses mouvements et peut recevoir qui il veut, selon le gouvernement installé par la junte, "à condition de ne pas quitter son village". Des proches du président déposé ont confirmé que Sidi Ould Abdallahi est bien dans son village et qu'il s'est même entretenu dès son arrivée avec ses partisans, en particulier des responsables du Front national pour la défense de la démocratie (FNDD), la coordination récemment créée par les partis opposés au putsch militaire. Il a pu également s'exprimer devant la presse étrangère à qui il a notamment déclaré : "Mon transfert à Lemden ne change en rien ma situation, parce que je reste un président en résidence surveillée", démentant au passage les affirmations de la junte selon lesquelles il s'est engagé à quitter la politique en échange de son régime de semi-liberté. Une chose est certaine, l'armée qui a cédé devant la menace des donateurs occidentaux de la Mauritanie de couper leur robinet des vivres ne laissera pas faire Sidi Ould Abdallahi si l'envie le prenait de vouloir jouer un rôle dans la sortie de crise. Les militaires auraient souhaité que le président déchu démissionne officiellement pour débloquer la situation et ouvrir la voie à la solution prévue par eux. Ce qu'exclut pour l'heure Sidi Ould Abdallahi. Selon son proche, Ahmedou Ould Hamed : "Il faut d'abord rétablir la légalité." Pour les partisans des putschistes, il est regrettable que la communauté internationale, plus particulièrement les Européens, fassent preuve d'une intransigeance "aveugle". "Il sera extrêmement difficile aux militaires, ainsi qu'aux parlementaires et à la population mauritanienne, de revenir en arrière", a résumé à la presse française Lemine Ould El-Kettab, ancien ambassadeur. En effet, en Mauritanie où l'opposition au coup d'Etat n'est pas arrivée à mobiliser massivement, sa majeure partie des voix préconise plutôt d'aider les putschistes dans leur volonté de revenir à la vie constitutionnelle par la voie démocratique. Et le point de vue commence à faire tache d'huile dans les milieux diplomatiques où il est constaté après trois mois que l'idée d'un retour au pouvoir du président Sidi Ould Abdallahi "n'est pas réaliste". La page est tournée d'une certaine façon, relate les journalistes étrangers en Mauritanie. L'Union européenne qui a fixé un ultimatum à la junte pour un retour à l'ordre constitutionnel d'ici le 20 novembre ne se fait plus d'illusion. D. B.