Le principal risque, qui porte sur la diminution importante des recettes pétrolières, pourrait affecter à terme la croissance par le biais d'un ralentissement du programme d'investissement public. L'économie mondiale a subi d'importants bouleversements depuis septembre 2008. La crise qui a débuté sous la forme d'un retournement du marché immobilier aux Etats-Unis a pris des proportions mondiales aujourd'hui et s'est propagée aux économies des pays riches comme des pays pauvres. Beaucoup estiment qu'elle pourrait bien figurer dans l'histoire comme la crise la plus grave depuis la Grande Dépression des années 1930. Le plus gros de l'orage financier est peut-être dépassé, mais la crise économique ne fait que commencer. La question n'est plus de savoir si le monde échappera ou pas à la récession, mais quelle sera sa profondeur et sa durée. Le scénario le plus optimiste table sur une reprise progressive de l'activité au cours du deuxième semestre de l'année prochaine. À l'instar des autres pays en développement, l'économie algérienne fait face à certains chocs externes inhérents à la crise financière internationale. Si le renforcement des réserves officielles de change et la forte croissance économique enregistrée les années précédentes ont fait que l'Algérie a montré une certaine résilience aux chocs externes, il reste que cette résilience faiblit actuellement sous l'effet de la contagion de la crise financière. Comme chocs externes auxquels fait face l'Algérie, l'inflation importée, vu l'importance accrue des importations des biens et services, même si la stabilisation du taux de change effectif réel contribue à atténuer l'effet négatif de l'inflation importée. Les experts évoquent également l'amenuisement du rendement des placements de l'Algérie dans l'hypothèse d'une récession qui aboutirait à une baisse des taux directeurs des banques centrales des principaux pays développés. Mais c'est surtout le retournement du marché pétrolier qui préoccupe le plus. Il y a moins de six mois, le prix du baril flirtait avec les 140 dollars, poussé par la demande insatiable des pays émergents las. La crise financière a eu raison de cette envolée. Depuis l'été dernier, les prix ont été divisés par deux. À Londres, mercredi dernier, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en janvier s'échangeait à 51,02 dollars, en baisse de 82% par rapport à la clôture de mardi. L'année 2009 s'annonce plus tendue si le monde plonge profondément dans la récession et entraîne un repli de la consommation et des prix de l'or noir. Le principal risque, qui porte sur la diminution importante des recettes pétrolières, pourrait affecter à terme la croissance par le biais d'un ralentissement du programme d'investissement public. La croissance de notre économie et les revenus de l'Etat sont très dépendants du secteur des hydrocarbures. En 2006, alors qu'il n'y avait pas encore la crise financière mondiale, le taux de croissance avait chuté à 1,8% en raison de la baisse de la production des hydrocarbures, due à l'arrêt des installations pour maintenance. La croissance hors hydrocarbures devrait atteindre près de 6%, en continuant d'être tirée par l'important programme d'investissement public. La croissance totale devrait, elle, s'établir autour de 3%, du fait d'une baisse des exportations hydrocarbures. Le FMI prévoit une croissance globale de 2,5% en 2009, une croissance hors hydrocarbures d'environ 6% si les projets importants d'investissement publics et privés se poursuivent. En revanche, la baisse des prix des hydrocarbures couplée à des importations élevées entraîneraient une dégradation significative du solde extérieur. “Le gouvernement devra se préparer à prendre certaines mesures conservatoires au cas où la conjoncture mondiale devrait rester durablement défavorable. Celles-ci pourraient inclure une rationalisation accrue des dépenses publiques, y compris une meilleure maîtrise des dépenses courantes, ainsi qu'une mobilisation encore plus efficace des recettes fiscales hors hydrocarbures”, suggère le FMI ainsi que beaucoup d'économistes. Dans le cas où cette décision serait prise, le taux de croissance en 2009 risquerait d'être encore plus faible. Car la croissance dans les secteurs, la construction et le BTP, entre autres, est essentiellement impulsée par les dépenses publiques. Par ailleurs, la croissance actuelle produit une concentration de revenus, sans contrepartie évidente, liée à la permanence de la rente. Si les salaires des travailleurs du secteur économique et de la fonction publique croissent faiblement, d'autres couches de la société se sont enrichies à la faveur de la libéralisation du commerce extérieur. La crise devrait alors nous faire prendre conscience des faiblesses de notre économie qui dépend des fluctuations des prix du pétrole. Les questions de la diversification, des réformes profondes, de l'amélioration des performances des entreprises se posent aujourd'hui avec acuité. Une politique de l'offre qui revitalise l'entreprise s'impose. L'investisseur privé national est là pour peu qu'on libère l'initiative. Il est disposé à investir davantage pour peu que les obstacles soient levés. Meziane Rabhi