La presse algérienne, qui a déjà payé un lourd tribut, avec l'assassinat de nombreux journalistes, est-elle à nouveau dans le collimateur du GSPC ? C'est en tout cas ce que laisse entendre cette organisation terroriste dans un communiqué mis en ligne le 23 décembre dernier. Bien que le document en question ne contienne pas de menaces directes et précises à l'endroit des journalistes, ses rédacteurs ont toutefois versé tout leur venin sur cette presse algérienne qui a choisi son camp depuis l'apparition du terrorisme en Algérie et qui a fait sien le combat contre l'extrémisme religieux qui a mis à feu et à sang le pays durant des années. Un choix qui a coûté la vie à une longue liste de journalistes. Se rendant compte de l'importance du rôle de la presse dans la lutte contre l'entreprise criminelle d'Al-Qaïda au Maghreb et contre l'intégrisme, Droukdel et ses acolytes tentent, à travers leur communiqué, d'entacher la presse algérienne en la qualifiant “d'alliée du diable qui, tout en obéissant aux instructions de l'Occident dans sa guerre propagandiste, a versé dans la manipulation, le mensonge et la désinformation qui sont devenus méthodiques”. Des propos d'une virulence qui laissent facilement déduire que désormais, les journalistes se logent, aux yeux des groupes armés, à la même enseigne que les forces de sécurité. Ce qui se confirme d'ailleurs dans certains passages de ce communiqué dans lequel il est souligné que “cette propagande et toute cette désinformation est imposée par les services de renseignement algériens avec la complicité de leurs relais dans certains journaux”. Des journaux dont certains sont cités nommément et auxquels d'ailleurs les chefs terroristes se sont adressés de façon particulière en leur apportant quelques “précisions” sur certaines informations publiées récemment. Il est à noter que dans le communiqué, Al-Qaïda ne se contente pas de traiter la presse de tous les qualificatifs mais ira jusqu'à inviter les journalistes, dans des termes qui prennent tantôt des allures de menace et tantôt des allures d'avertissement ou d'intimidation, “à faire preuve d'objectivité et à ne plus soutenir la campagne propagandiste des pharaons des temps modernes”. Au-delà de la violence de ces propos, il y a lieu aussi de s'interroger sur le contexte de la publication d'un tel document sur un site internet. Il faut rappeler que par le passé, l'organisation de Droukdel s'est livrée, à travers le net et la chaîne satellitaire Al Jazeera, à une guerre propagandiste qui transformait même les coups subis en victoires alors qu'aujourd'hui, cette machine de propagande est affaiblie, notamment depuis la reddition de Abou Abderrahmane, le concepteur, producteur et fournisseur d'images vidéo et photos à la chaîne qatarie. À cela s'ajoute également les dissensions internes et les problèmes logistiques qui poussent les terroristes à mettre toute la société dans le collimateur comme en témoignent plusieurs actes dont l'attaque d'une caserne de la Protection civile récemment à Azzefoun, l'attaque d'un café maure appartenant à un simple citoyen, à Draâ El Mizan et aussi les nombreux kidnappings de citoyens et toutes les victimes civiles des attentats de l'été dernier. Et voilà que le GSPC menace d'ajouter la presse à la liste de ses cibles. Samir LESLOUS