Estimant qu'il s'agit d'un “grave précédent”, menaçant “la paix, la sécurité et la stabilité au Soudan et dans la région”, l'Algérie rejette fermement l'émission d'un mandat d'arrêt contre le chef de l'Etat soudanais par la Cour pénale internationale, et se déclare solidaire avec Khartoum. Accueillant avec un “profond regret” la décision de la Cour pénale internationale (CPI) d'émettre un mandat d'arrêt contre le président du Soudan Omar el-Bachir, l'Algérie estime que cette décision “constitue un grave précédent porteur de menaces réelles pour la paix, la sécurité et la stabilité au Soudan et dans la région”, a indiqué une source jeudi à l'Agence Algérie Presse Service. “L'Algérie déplore qu'une telle décision ait été prise en dépit des graves menaces qu'elle fera peser sur la poursuite des efforts de paix et de la réconciliation visant au règlement politique de la crise au Darfour ainsi que sur la stabilité et la sécurité de l'ensemble de la région”, rapporte la même source. Alger marque ainsi sa solidarité avec Khartoum, tout en manifestant son ferme rejet de la pratique du deux poids, deux mesures, et de la politisation de la justice internationale. Dans le même ordre d'idées, l'Algérie renouvelle son attachement à la demande exprimée par l'Union africaine et la Ligue des Etats arabes en faveur d'une suspension de la procédure engagée par la Cour pénale internationale pour permettre la poursuite des efforts en cours visant un règlement rapide et durable de la crise au Darfour. Redoutant les conséquences que peut engendrer l'arrêt de la CPI, Alger exprime sa “vive inquiétude de voir ainsi compromettre l'ensemble des efforts déployés jusqu'ici par la communauté internationale, en particulier l'Union africaine, la Ligue des Etats arabes, l'Organisation de la conférence islamique et le Mouvement des pays non-alignés, pour circonscrire et régler cette crise”. Partant de là, elle “appelle au devoir et à la responsabilité des membres du Conseil de sécurité dans le maintien de la paix et de la sécurité internationale et les exhorte à appuyer l'équité partout dans le monde en donnant suite à la demande arabe et africaine de suspension de la procédure de la Cour pénale internationale”. Réaffirmant “sa solidarité et son soutien actifs au Soudan, l'Algérie ne ménagera aucun effort pour accompagner la démarche collective de l'Union africaine et de la Ligue des Etats arabes pour le règlement de la crise au Darfour et la préservation de la souveraineté, de l'unité et de l'intégrité territoriale de ce pays frère”, souligne-t-on. Il y a lieu de noter que la réaction d'Alger s'inscrit en droite ligne avec celle de l'Union africaine, qui a demandé, par la voix de son conseil de paix et de sécurité, au Conseil de sécurité de l'ONU d'interrompre la procédure de la CPI. “Le CPS a décidé de poursuivre les démarches entamées vis-à-vis de la communauté internationale et surtout du Conseil de sécurité de l'ONU pour qu'il interrompe ce processus engagé, pour permettre et donner une chance à la paix au Soudan”, a déclaré à la presse l'ambassadeur du Burkina Faso et président du CPS, Bruno Nongoma Zidouemba. Soulignant l'engagement de l'UA dans la lutte contre l'impunité, il a ajouté : “Nous avons demandé au président de la Commission (Jean Ping) de dépêcher à New York, dans les plus brefs délais, une délégation de haut niveau pour entreprendre ces démarches auprès du Conseil et du Secrétaire général de l'ONU”. Cette délégation sera chargée “de réitérer le souhait et la requête de l'UA exprimés par les chefs d'Etat lors du dernier sommet (en février) afin que le Conseil de sécurité suspende la procédure en cours de la CPI et donne plus de chances à la paix”, a-t-il précisé. En effet, l'article 16 du Statut de Rome, texte fondateur de la CPI adopté en 1998, prévoit la possibilité de suspendre des poursuites de la CPI pendant 12 mois à compter d'une résolution en ce sens du Conseil de sécurité de l'ONU. Merzak Tigrine