Les “bombes” du voile ! Le hidjab n'est plus synonyme d'ascétisme ou de détestation du beau. Il fait la mode. Il est fashion. Le “multazim” a perdu, dirions-nous, face à la coquetterie. Un paradoxe. Alors que le hidjab rime avec pudeur et réserve, le mot séduction s'attache de plus en plus à ce voile lui faisant perdre pour les rigoristes et puristes, sa valeur religieuse. Nombreuses sont les musulmanes désireuses de ne plus enterrer leur beauté sous le voile. C'est ainsi que la mode amène sous le giron de la religion son lot de fidèles. Les “bombes du voile” sont passées du noir corbeau et de la bâche Mazda (marron terne) aux voiles fashion et coloré. Avec chapeau et casquettes assortis, s'il vous plaît, qui laissent s'échapper des franges de cheveux ou des oreilles ornées de boucles, sur un visage chaudement maquillé ! Au grand dam des conservateurs et militants de l'islamisme qui crient à l'hérésie mais sans trop convaincre. Le hidjab traditionnel n'est plus que le signe des plus engagées, de militantes de la cause islamiste version salafiste, les adolescentes, ces femmes de demain, sont de loin nombreuses à avoir adopter le voile fashion. D'ailleurs, déferlante du voile depuis son coloriage. Que ce soit dans les pays arabo-musulmans ou en Occident, le voile se porte et s'exhibe dans des atours chatoyants. Après le boom de religiosité des années 1980-90, voici le temps de la mode. Mais contrairement à la mode, le port du hidjab n'est pas prêt de disparaître de sitôt. Ce n'est pas un simple mouvement éphémère, les converties au voile se comptent même dans les pays où son port est strictement interdit dans les écoles et les administrations, comme en Turquie et chez nos voisins en Tunisie. Cela dit, même si la foi et l'obligation sociale restent les raisons les plus évoquées par ces femmes voilées, la mode a également fait son chemin. À telle enseigne que son port a généré une véritable industrie. Le marché de la mode islamique fait même recette. Des boutiques entièrement dédiées à la vente de hidjab et à ses multiples accessoires ont pignon sur rue, y compris à Paris, Londres et New York, les temples de la mode et des tendances. Et il y en a pour tous les goûts, jusqu'au petit rien. Les défilés de mode islamique se multiplient. Le voile a ses stylistes et couturiers. Au Danemark, la télévision publique DR Krum a organisé, en juin 2008, le concours de Miss Voile 2008. Les voilées d'aujourd'hui n'ont rien à envier à leurs consœurs non voilées, elles sont si belles, si coquettes sous leurs foulards aux mille couleurs et leur port surtout avec des bouts de lobes d'oreilles, des yeux fortement soulignés… Le voile a même généré des forums en ligne où s'échange le moindre détail sur la mode islamique. Certaines deviennent même plus belles avec le voile. Et même si la séduction n'est pas voulue de prime abord, des femmes le portent d'une façon telle que le regard ne peut que s'allumer. Des sociologues nouvelles tendances vont jusqu'à parler de désir dans le jeu du voile. Le voile avait pour fonction de cacher, aujourd'hui, récupéré par d'habiles mains de couturière et de designer, même des marques type Saint Laurent ou Chanel se sont mises de la partie, les artifices affichent ce qui était caché et attirent le regard. Le voile new-look joue sur le caché et le montré. Il cache un peu mais pas beaucoup. Il cache pour mieux intriguer et allume les regards. N'est-ce pas là le principe même de la séduction ? Alors le voile est-il complètement“déreligiosisé” ? D. Bouatta