La désapprobation d'une rare virulence exprimée sur toutes les chaînes de radio, mercredi dernier, par Ahmed Ouyahia de “la stratégie industrielle” initiée et pilotée par son ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements, M. Abdelhamid Temmar, annonce peut-être une nouvelle démarche économique du gouvernement, tout en indiquant la difficulté pour l'Algérie de se doter enfin d'une orientation économique cohérente et efficiente. Ce qui semble certain, c'est que toutes les notions temmariennes sont réfutées en bloc et sans nuance. Le Premier ministre va jusqu'à les qualifier d'effets d'annonce, voire de propagande, sans aucune incidence sur l'économie réelle. Toute l'action de M. Temmar depuis l'année 2000 est en quelque sorte traitée d'ovni, puisque “la stratégie industrielle” du ministre n'a jamais été discutée en Conseil des ministres. “Le tout-privatisable”, “la stratégie hors hydrocarbures”, “la mise à niveau” et autres “les assises”, toutes ces idées chères à M. Temmar sont déclarées sans ambages caduques désormais. Mais là où la rupture est nette entre les conceptions de M. Temmar et celles que l'on peut inférer des déclarations du Premier ministre, c'est le rôle économique imparti à l'entreprise publique, et par-delà celle-ci à tout le secteur public. Pour M. Temmar, l'entreprise publique est tout juste une “quincaillerie” dont l'Etat a intérêt à se délester (privatiser ?) n'importe comment, alors que M. Ouyahia laisse clairement entendre que celle-ci (l'entreprise publique) est destinée à jouer un rôle central et moteur dans la nouvelle stratégie industrielle en gestation. Cette dernière reposera sur le programme du président de la République et les mesures qu'il a prises récemment et dont M. Ouyahia assure qu'il a déjà commencé à mettre en œuvre. “L'Algérie n'est pas un bazar”, affirme fermement M. Ouyahia, indiquant ainsi que “le tout-privatisable” n'est plus de mise et que le partenariat avec l'investisseur étranger doit d'abord être jugé à l'aune de son apport au développement économique de l'Algérie et toujours en association avec une entreprise algérienne. Quant au privé algérien, s'il est porteur de beaucoup d'espoir, il “doit se développer culturellement et structurellement”. Difficile de décoder cette assertion du Premier ministre et d'en déduire le rôle qui va être fixé au secteur privé économique. Il semble bien, en définitive, que M. Ouyahia s'en prend surtout au “tout-libéral”. Cela augure-t-il d'un retour à l'orthodoxie économique étatique ? Rachid Si Ahmed