Les pays du Sud, qu'ils soient classés “émergents” ou pauvres, s'attendent à une profonde réforme des institutions financières internationales. Mieux réguler les marchés financiers et lutter contre les paradis fiscaux Cette préoccupation subite des pays riches (elle date de moins d'une année, avec la prise de bec entre Sarkozy et le Premier ministre luxembourgeois), la lutte contre les paradis fiscaux qu'on fait mine de seulement découvrir, laisse dubitatif. Hedges funds et agences de notation À peu près tout le monde s'accorde sur la mise au pas des fameux “hedges funds”, les fonds spéculatifs qu'on accuse de tous les maux. Mais des désaccords profonds subsistent entre les pays, selon qu'ils soient riches ou pauvres, ou même entre ensembles géographiques. Dès le 30 mars, le secrétaire au Trésor américain déclarait que les USA étaient hostiles à la création d'un “supergendarme” de la finance internationale, estimant que le rôle de régulation échoit aux “autorités financières nationales qui doivent superviser leurs institutions financières dans leur globalité”, ajoutant que les USA “ne donneront à personne la responsabilité de décider quel est l'équilibre souhaitable entre efficacité et sécurité pour nos marchés”. Le secrétaire d'Etat au Trésor US pense que “les réformes ne fonctionneront pas si nous n'amenons pas les autres (pays) à partager nos vues” et se montre sceptique quant à la capacité des banques centrales et des mécanismes régulateurs à sonner l'alarme assez tôt contre les crises. Par ailleurs, les pays du G20 sont décidés à en découdre avec les agences de notation qu'ils accusent de tricherie. Inquiétudes du Sud Présentée à l'avant-veille de la réunion du G20, une étude réalisée par BBC World Service, affirme que 70% des 29 913 personnes interviewées dans une trentaine de pays s'inquiètent plus du coût des produits alimentaires qui sont en train de flamber que de la récession actuelle. Tous ces gens pensent que des changements majeurs devraient être opérés au niveau du système économique mondial. L'aide au développement,toujours à la traîne Si l'OCDE annonce que l'aide au développement n'a jamais atteint un tel pic, avant 2008 qui a vu le chiffre de l'aide publique au développement (APD) dépasser les 10% (10,2%) en termes réels pour s'établir à 119,8 milliards $ (90 milliards d'euros), elle tempère ce résultat en émettant un bémol, avertissant tout de même que le ralentissement qui a frappé les pays pauvres est important, tout en demandant expressément aux pays du G20 de s'engager fermement à atteindre les objectifs tracés pour l'aide internationale, car “les produits de base, c'est-à-dire ceux que les pays à faibles revenus exportent, ont vu leurs prix baisser, alors que les IDE ainsi que les envois des travailleurs émigrés sont en baisse”. Max Lawson d'Oxfam, organisation qui lutte contre la faim dans le monde, même s'il applaudit les résultats exceptionnels des aides aux pays pauvres, dont les pays d'Afrique subsaharienne, qui ont bénéficié de 22,5 milliards $, rappelle que les banques ont reçu 70 fois plus d'aides que les pays pauvres dans le monde, ajoutant par ailleurs que “nous avons besoin que le G20 prenne des mesures rapides à Londres cette semaine pour sauver des bébés, pas juste des banquiers”. La voix de l'Afrique S'il est question d'augmenter les ressources du FMI, aucun accord ne s'est encore dégagé à propos de la somme et de la quote-part de tout un chacun des pays membres des plus grands ensembles économiques de la planète : les USA souhaitent tripler les ressources du FMI alors que les Européens voudraient seulement les doubler même si Christine Lagarde affirme que les pays qui ont été le plus rapidement touchés par la crise actuelle, et le plus gravement, sont les pays en développement, c'est-à-dire ceux qui auront le plus besoin de l'aide du FMI. Des pays qui auraient d'abord besoin de politiques de relance, avant toute injection de fonds dans leurs économies, toujours selon Christine Lagarde, ministre française de l'Economie. Outre les membres permanents du G20, le Premier ministre britannique a invité au forum du 2 avril plusieurs autres pays et organisations internationales, dont l'Espagne, le représentant de l'Asean, l'Union africaine (l'Afrique dispose d'un siège au niveau du G20, tenu par l'Afrique du Sud) et le Nepad. L'Afrique est désormais décidée à se rendre à Londres pour y parler d'une même voix, en présentant un front commun contre une injustice due plus aux humains qu'à une malédiction du sort. Djamel Zidane