“L'Algérie, République démocratique et populaire, pour laquelle un million et demi de personnes se sont sacrifiées, est morte. Bienvenue au royaume de Bouteflika”, disait, hier matin, Ali Fawzi Rebaïne, lors d'une conférence de presse tenue au Centre international de presse (CIP). Commentant le score obtenu par le candidat indépendant qui a atteint les 90,24%, il ira jusqu'à le comparer à l'ancien président de la République centrafricaine de 1966 à 1979, Jean-Bedel Bokassa, qui s'était autoproclamé empereur, sous le nom de Bokassa Ier. “Je suis désolé que le régime politique algérien soit aujourd'hui comparable à ceux d'autres pays d'Afrique, et ce, malgré tout le respect que j'ai pour eux”, s'est-il indigné. Le président du parti Ahd 54, classé à l'avant-dernière place avec 0,93% des voix, se présente, depuis le début de l'élection présidentielle, comme “la seule opposition” au régime politique en place. Ne voulant pas polémiquer sur son propre résultat, M. Rebaïne préfère évoquer le score obtenu par le Président-candidat qui, selon lui, ne reflète pas la volonté réelle du peuple algérien. “Je n'accepterai mon score que s'il est prouvé que les résultats officiellement annoncés sont vrais. J'entends par-là le taux de participation et le score obtenu par Abdelaziz Bouteflika”, a-t-il ironisé. En réponse à une question relative à la fraude, Ali Fawzi Rebaïne n'a pas mis de gants, fustigeant les institutions publiques, notamment la télévision algérienne. “J'ai perdu cette bataille, non pas contre Abdelaziz Bouteflika mais, contre l'ENTV qui est un véritable instrument de propagande à la solde du pouvoir et qui a fabriqué des images de foules, là où il n'y en avait pas. Il y a eu fraude et elle a commencé avant le 9 avril, avant même le lancement officiel de la campagne, lorsque le territoire algérien a été submergé d'affiches, plus grandes les unes que les autres, jusqu'aux villages les plus isolés, où il n'y a ni eau courante ni routes goudronnées. Quant aux observateurs locaux et malgré les accords tacites entre candidats, leur nombre n'était pas suffisant pour couvrir les 50 000 bureaux de vote. Contrairement à Abdelaziz Bouteflika, tous les candidats ne disposaient pas de moyens financiers nécessaires à une surveillance efficace”, a-t-il affirmé. Il s'en est également pris à la commission politique indépendante de surveillance de l'élection présidentielle, actuellement présidée par M. Teguia, et qui, pour rappel, avait été supprimée après les élections législatives de 2007. “J'avais demandé la reconduction de cette commission, seulement son président a été désigné par Abdelaziz Bouteflka qui était lui-même candidat. Quelle crédibilité pouvait donc avoir cet organe de contrôle ?”, s'est-il interrogé. Ali Fawzi Rebaïne, qui s'était présenté à la présidentielle de 2004 à l'issue de laquelle il avait obtenu 0,63% des voix, a indiqué que ce taux ne l'avait déjà pas empêché de continuer à militer et que cela n'est toujours pas le cas aujourd'hui. “Lorsque les espaces de liberté nous sont fermés, il faut continuer la lutte car chaque espace déserté par l'opposition sera investi par le pouvoir en place”, a-t-il conclu. Amina Hadjiat