Président du parti Ahd 54 et malheureux candidat à l'élection de jeudi denier, Ali Fawzi Rebaïne est convaincu que vivre en démocratie en Algérie n'est pas pour demain. « La République algérienne démocratique et populaire est morte. Le nouveau royaume de Bouteflika rappelle celui de l'empereur Bokassa. C'est triste ! », a-t-il lancé dans ce qui s'apparente à une oraison funèbre, lors d'une conférence de presse tenue hier au Centre international de presse à Alger. M. Rebaïne faisait allusion à Jean-Bedel Bokassa, président, puis autoproclamé empereur de la République centrafricaine de 1966 à 1979. Il estime avoir « cherché les 12 millions de personnes qui ont voté pour Bouteflika, mais je ne l'ai pas trouvé ni dans les centres de vote ni ailleurs », en soutenant : « A 90% des voix remportées par lui, on aurait dû voir des marées humaines pavoiser, et pas seulement les plans serrés de l'ENTV ». Et d'avertir plus loin : « Un 3e mandat pour le président va le pousser à entretenir le culte de la personnalité. » Dans une allusion à la machine de la fraude qui, à ses yeux, « s'est mise en marche durant la préparation et l'organisation du vote », le président du parti Ahd 54 considère que le bourrage des urnes était juste une formalité le jour du vote. « Le pouvoir n'a pas fait le moindre effort pour mettre en place une urne transparente. Et il est normal d'avoir ce taux-plébiscite. Ce résultat ne donnera pas plus confiance au peuple. C'est une forme de hogra », s'est-il encore écrié. « Lors de la collecte des signatures, nous avons remis 128 000 signatures au Conseil constitutionnel. Celui-ci n'a retenu que 97 000 », affirme-t-il, en brandissant un acte notarié prouvant ses propos. Pour lui, cette institution, devenue juge et partie et qui falsifie les chiffes, n'a pas de crédibilité. Après avoir taillé des croupières aux représentants des missions d'observation de la Ligue arabe, de l'Organisation de la conférence islamique (OCI) et de l'Union africaine (UA), accusés d'avoir « prêté le flanc au pouvoir en estimant que le vote s'est déroulé dans de bonnes conditions », le conférencier soutient qu'il ira saisir l'ONU sur cette fraude. Accrédité d'un score de 0,93% des voix exprimées, M. Rebaïne se dit convaincu de ne pas avoir perdu la « bataille » contre le président Bouteflika, mais contre « l'ENTV et ses plans serrés ». « Durant la campagne, je passais 2mn30sec par jour, alors que le président, appuyé par d'autres partis, des associations de tous bords et de ministres, occupait l'antenne pendant 1h30 », dénonce-t-il. Evoquant le scrutin à l'étranger, le président de Ahd 54 révèle que « les ambassades, les consulats et l'argent du ministère des Affaires étrangères ont été mis à contribution pour réussir sa campagne ». Le président de Ahd 54 n'a pas été tendre avec la politique du président Bouteflika. « Sa politique sociale est un échec. Sur le plan des libertés, c'est plutôt un désastre », commente-t-il. Preuve en est, selon lui, l'état d'urgence toujours en vigueur, les libertés de réunion sous contrôle, des associations de la société civile conditionnées et une presse privée mise au pas. « Ce sont autant de raisons qui ont conduit les citoyens à ne pas aller voter », dira-t-il. Et de conclure : « Ce qu'il n'a pas fait en 10 ans, je doute fort qu'il puisse le faire en 5 ans. »