Liberté : Quelles sont les difficultés auxquelles sont confrontés les myopathes en Algérie ? Ahmed Boucheloukh : Les problèmes sont multiples : pas de moyens de dépistage, scolarisation aléatoire, accessibilité difficile, prise en charge au plan social et financier… On perd chaque année des centaines de malades en silence et dans l'indifférence la plus totale. Aujourd'hui, la qualité de vie de ces malades est lamentable par manque de centres de rééducation spécifique aux pathologies, de personnel médical qualifié et de conseils génétiques. En France, l'espérance de vie des myopathes a progressé de plus de 10 ans grâce à une bonne prise en charge médicale et sociale. Les malades et leurs familles rencontrent des difficultés dans l'accès à la consultation et au diagnostic. L'association intervient auprès des centres hospitaliers et des administrations (Cnas, Direction de l'action sociale…) pour les aider. Il semblerait qu'il n'y ait pas moyen de dépister la maladie en Algérie et que la biopsie se fait à l'étranger… Il n'existe pas effectivement en Algérie d'organisme qui fait la biopsie musculaire. Les CPK, LDH et EMG sont les seuls examens réalisés dans le pays. Pour l'ADN, les tests se font en France grâce à l'Association française contre les myopathies (AFM), avec laquelle nous sommes en partenariat. Beaucoup de myopathes sont sous respirateur artificiel à l'hôpital. Quelles sont les contraintes ? Pour éviter la ventilation assistée, il faut prendre en charge le myopathe bien avant qu'il n'arrive au stade de la trachéotomie, dans un centre spécialisé pour kinésithérapie respiratoire. Les contraintes sont liées au fait qu'il faut mettre à la disposition du myopathe un respirateur artificiel, un groupe électrogène pour parer les pannes d'électricité, des canules parlantes, détacher un paramédical pour l'assistance à domicile. Il faut penser aussi à former les membres de la famille pour l'utilisation de l'équipement, dont un lit médicalisé. Le coût total de la prise en charge médicale est d'environ un million de dinars. Dans quels objectifs a été créée l'association Défi et Espoir pour les myopathies et quelles sont ses activités ? ll L'association Défi et Espoir contre les myopathies (ADEM) a été créée le 20 octobre 2001. Elle regroupe des parents de malades, des malades eux-mêmes, ainsi que des personnes valides. Nous nous sommes regroupés en association pour tenter de soulager les souffrances des malades et de leurs familles. Il faut croire que les myopathies ne sont pas prises en compte par le système de santé. L'ADEM lutte, depuis sa création, pour l'amélioration des conditions de vie des myopathes et leurs proches ainsi que leur prise en charge par les différents secteurs (sanitaire et administration), afin de favoriser leur insertion sociale. Elle mène un combat contre toute forme de discrimination et de marginalisation et développe des liens avec les professionnels médicaux, paramédicaux et les organismes publics. L'ADEM a recensé plus de 400 personnes atteintes de différentes maladies neuromusculaires à l'est du pays. Ils résident majoritairement à Constantine. Entretien réalisé par S. H.