La conférence de Durban II, qui a débuté hier à Genève, devait être le grand rendez-vous de l'ONU sur le racisme. Mais la réunion a tourné au vinaigre avec l'absence de nombre de pays occidentaux. La veille de la conférence, Washington devait donner le la à ce boycott. L'Amérique d'Obama que l'on avait pensé différente de celle de son prédécesseur, George Bush, le chef de file des néoconservateurs, a été suiview immédiatement par plusieurs pays proches des Etats-Unis. Alors que l'Australie, le Canada et Israël avaient depuis longtemps annoncé qu'ils ne signeront pas la déclaration finale de la conférence, des pays européens se sont mis aux abonnés absents à l'ouverture de la conférence. Le 6 mars dernier, l'Italie avait déjà refusé de participer à la conférence, suivie des Pays-Bas, de l'Allemagne et de la Pologne. Robert Wood, porte-parole du département américain d'Etat dirigé par Hillary Clinton, a expliqué la décision de Washington "inattendue" dès lors que le nouveau locataire de la Maison-Blanche, un Noir avec un zest d'islam que lui-même vient de revendiquer fièrement en Turquie, il y a à peine deux semaines : les Etats-Unis ne peuvent pas accepter "certains passages de la déclaration finale qui ne répondent toujours pas aux inquiétudes" américaines. En réalité, les boycotteurs ont craint que la conférence ne se transforme en procès contre Israël d'autant que l'agression de ce dernier contre les populations de Gaza est de fraîche date et que des responsables israéliens encourent la justice internationale. Quelles qu'en soient les raisons, l'Amérique d'Obama a réédité son coup de 2001 lorsqu'elle a claqué la porte à la première conférence de Durban, en Afrique du Sud, après des débats houleux entre Occidentaux et Etats musulmans. Aucun consensus ne s'était alors esquissé autour de sujets épineux comme le traitement des Palestiniens par Israël ou l'antisémitisme. Et la conférence s'était donné rendez-vous à Genève pour apurer les problèmes qui fâchent. En réalité, la situation n'a pas évolué et les promesses d'ouvertures d'Obama semblent n'être que des promesses. Du moins en ce qui concerne ses déclarations à propos de la politique du "deux poids, deux mesures" en vigueur dans le Moyen-Orient et qu'il se proposait d'équilibrer. Pourtant, un compromis a été accepté vendredi dernier par les négociateurs des pays européens et la plupart des Etats musulmans sur les questions relatives aux discriminations religieuses et au Proche-Orient. Mais pour les Etats-Unis, les passages relatifs au conflit israélo-palestinien vont à l'encontre d'une "totale liberté d'expression", voulue par Obama. En effet, la mouture actuelle de la Déclaration finale ne contient pas de singularisation d'Israël ni de mention de la diffamation des religions, considérés comme des "lignes rouges" par les Occidentaux. L'Union européenne, qui s'était mise au garde-à-vous devant le nouveau président américain à Londres, à Strasbourg, en Allemagne et en Pologne, n'a pas été entièrement aux côtés des états-Unis et d'Israël, la Grande-Bretagne et la République tchèque ayant annoncé qu'ils dépêcheraient leurs ambassadeurs en Suisse et de son côté la France a décidé de prendre part à la conférence afin de défendre "sa position" sur les droits de l'homme, selon une source proche de l'élysée citée par des médias français. Le pape Benoît XVI, qui a envoyé une délégation du Vatican sur les bords du lac Léman, a parlé de la conférence comme d'une occasion importante de lutter contre les discriminations. Avec ce boycott et ces défections, le texte de Durban II pourrait n'avoir aucune portée réelle. Mais on retiendra que les états-Unis sont loin d'abandonner leur politique du deux poids, deux mesures s'agissant d'Israël. Alors, les belles paroles d'Obama ! D. Bouatta