Farouk Ksentini, président de la Commission nationale de promotion et de protection des droits de l'homme (CNPPDH), a joint, jeudi lors d'un forum organisé à El Moudjahid (Alger), sa voix à celle du président Bouteflika qui a promis, lors de la campagne électorale, d'aller vers l'amnistie générale au profit des terroristes qui déposeraient les armes. “La réconciliation a besoin d'un second souffle, c'est-à-dire de s'étendre à l'amnistie générale”, a-t-il soutenu. “Il faut retourner à la fraternité. Il n'y a ni vainqueur ni vaincu. L'amnistie est une mesure tout à fait naturelle puisque toutes les situations de violences internes se sont achevées par l'amnistie générale. Même la guerre de libération nationale n'a pas échappé à cette règle”, professe-t-il. Me Ksentini a toutefois rappelé les conditions rigoureuses fixées par le chef de l'Etat avant de mettre en œuvre ce chantier politique : la remise des armes par les 400 terroristes encore en activité dans leur totalité et en même temps, et la consultation du peuple par le biais d'un référendum. Une chose est sûre : l'amnistie ne prendra en charge que le volet sécuritaire. Et en attendant, des mesures complémentaires seront prises par le président de la République pour corriger les ratés de la réconciliation nationale. “Il faut que la réconciliation nationale ne laisse personne sur le bord de la route”, plaide Me Ksentini. Sa conviction est que la réconciliation nationale va dans le sens du renforcement des droits de l'homme. Comment ? Son but est de rétablir la paix civile et la sécurité, explique-t-il avant de reconnaître : “Oui, nous avons renoncé à la justice car le retour à la paix civile est conforme aux intérêts supérieurs de la nation.” Parlant de la situation des droits de l'homme en Algérie, Me Ksentini a soutenu que “l'Algérie est devenu un véritable Etat démocratique, mais débutant”. “Depuis 1999, nous sommes devenus un pays émergent en matière des droits. On n'est pas la Suède, mais beaucoup de choses ont été faites. L'Algérie n'est pas un Etat policier ni une théocratie, mais une démocratie populaire, une démocratie à ciel ouvert. On est deuxième en Afrique juste derrière l'Afrique du Sud”. Pour appuyer son plaidoyer, Me Ksentini évoque la liberté de presse, la liberté religieuse, la liberté de vote qui seraient consacrées en Algérie. Se voulant objectif, ce dernier a reconnu qu'il reste beaucoup de choses à faire en matière de droits sociaux et du statut de la femme. “Il y a dans ce pays une souffrance sociale considérable”, concède-t-il avant de se rattraper : “en plus des moyens financiers considérables dont dispose le pays, il y a une grande volonté politique de se débarrasser de cette mal-vie”. En plus, il estime que les droits de l'homme doivent faire l'objet d'une surveillance permanente au risque d'être remis en cause. “Il n'y a pas plus fugace que les droits de l'homme”, explique-t-il. Ce qui ne l'a pas empêché de critiquer ceux qui dénoncent les atteintes aux droits de l'homme en Algérie. “Il y a des gens qui ne sont jamais satisfaits et qui dénigrent tout. C'est une attitude normale”, s'est-il emporté. Et de recommander : “L'Etat, c'est comme un élève qui n'a pas bien appris sa leçon : plutôt que de le dénigrer constamment, il faut l'encourager à aller de l'avant. Il faut protéger l'Etat contre lui-même.” Et pour être dans l'air du temps, le président du CNPPDH a décoché une petite fléchette à l'endroit de l'opposition dont il déplore l'absence au dernier scrutin présidentiel. “Je n'ai pas compris pourquoi l'opposition a renoncé à jouer son rôle. La presse est aujourd'hui la seule opposition dans le pays. Ce qui n'est pas normal. Nous avons besoin d'une opposition véritable qui jouera le rôle qui est le sien. On ne peut pas tout de même reprocher au président de la République de ne pas encourager l'opposition ou bien faire son travail à elle”, relève-t-il.