La fin de non-recevoir apportée à sa demande insistante de dissolution de l'Assemblée pourrait conduire la première dame du Parti des travailleurs à reconsidérer les termes de la trêve tacite conclue avec le président de la République. Les députés, qui se faisaient certainement du mouron à l'idée de voir leurs privilèges s'évaporer, dans l'éventualité de la dissolution de l'Assemblée, peuvent désormais dormir sur leurs deux oreilles. Et pour cause : le premier d'entre eux, Abdelaziz Ziari, vient de les rassurer quant à leur avenir. “La dissolution n'a jamais été à l'ordre du jour”, a-t-il tranché vendredi sur les ondes de la radio. Le numéro trois dans la hiérarchie protocolaire ne se contente pas d'apporter un démenti ; il ajoute pour mieux enfoncer le clou que cette dissolution “n'a jamais été à l'ordre du jour et n'a même jamais été envisagée un seul instant, la seule personne habilitée à la dissoudre est le président de la République”. Pour le président de l'Assemblée, “la dissolution de l'Assemblée est une question qui, franchement, ne présente aucun intérêt dans l'état actuel des choses. Croyez-moi, ce n'est absolument pas un problème à poser actuellement”. Il rappelle que la dissolution, donc la convocation de législatives anticipées, intervient par “nécessité politique” en l'occurrence une crise politique grave. Ce qui n'est pas du tout le cas car, d'après Ziari, tout baigne dans l'huile entre l'Exécutif et le législatif. “Il n'y a aucune forme de problèmes qui se posent entre l'Exécutif et le législatif et il n'y a jamais eu autant d'harmonie entre ces deux pouvoirs qu'en ce moment”, se réjouit-il. Mais le président de l'Assemblée ne s'en tient pas au démenti par rapport à la dissolution, puisqu'il est parti dans un plaidoyer pro domo pour l'institution qu'il préside. “Nous nous efforçons de faire du député le meilleur des médiateurs entre les citoyens et les autorités supérieures”, argumente-t-il. “Ambiguïtés” dans l'exercice de leur mission de contrôle localement, obstruction, “bureaucratie et autoritarisme” de la part de l'administration sont autant de problèmes auxquels seraient donc confrontés nos vaillants députés. Pourtant, la réalité est bien loin de cette photographie idyllique que fait Ziari de l'APN. Car depuis la révision constitutionnelle, elle est réduite à une simple chambre d'enregistrement qui ne pèse d'aucun poids sur le jeu politique, dont le maître absolu reste l'Exécutif et son chef, le président de la République. Ni elle ne peut prendre une initiative de loi ni mettre sur pied une commission d'enquête, ni encore moins censurer le gouvernement ; l'APN actuelle se contente de voter les textes du gouvernement et, de temps en temps, appeler des ministres pour la soporifique séance de questions orales, face à des travées souvent vides au neuf-dixième. C'est dire que les arguments de M. Ziari pour justifier de l'utilité de l'APN sont loin d'emporter l'adhésion des observateurs. D'ailleurs, sa sortie de vendredi s'adresse moins à ces observateurs qu'à la présidente du Parti des travailleurs qui a fait de la dissolution de l'APN un leitmotiv de son discours politique. Depuis des mois, elle n'a pas raté une seule occasion de charger, de pilonner cette Assemblée dont elle est pourtant membre, estimant qu'elle est “mal élue”, qu'elle “est discréditée”, qu'elle “n'est pas représentative”… Dans sa croisade anti-APN, la première dame du PT a cherché même la caution du président de la République en lui suggérant dernièrement des législatives anticipées, histoire de mieux asseoir sa légitimité, après une présidentielle entachée de “fraude massive”. Mais, visiblement, Louisa Hanoune n'a plus l'oreille du Président qu'elle s'est portant scrupuleusement gardée de brocarder jusque-là. Dans le démenti de Ziari, difficile de ne pas voir l'ombre de Bouteflika. D'où cette question de se demander si la fin de non-recevoir opposée à sa demande insistante de dissolution ne marque pas la fin de la collaboration entre Louisa Hanoune et le pouvoir. La réponse ne saurait tarder. Hier, un haut responsable du Parti des travailleurs, joint au téléphone, nous a indiqué que la réponse de Ziari était à “l'ordre du jour” et qu'une conférence de presse allait avoir lieu.