Les actes commis aux quatre coins du pays sont autant de démentis aux déclarations officielles. La Kabylie n'en finit pas de subir les coups de boutoir du GSPC qui y opère, manifestement, comme en terrain conquis. Vendredi, un faux barrage a été encore perpétré en plein jour et pas loin d'un cantonnement militaire, sur la route menant de Tizi Ouzou vers Boghni, un axe que les habitants de la région qualifient de “coupe-gorge” tant il aura, régulièrement, été le théâtre d'attaques meurtrières de groupes armés, ayant fait plusieurs dizaines de morts. Il y a un mois, précisément mercredi 5 juin, neuf policiers sont tombés dans un guet-apens à Béni Douala et quatre autres soixante-douze heures après. La multiplication des actes terroristes, à une telle cadence, ne peut que susciter légitimement des interrogations quant à la situation en Kabylie qui passe pour être un des bastions “résiduels” des groupes de Hassan Hattab. Mais des interrogations aussi par rapport à la lutte antiterroriste en général qui, tout en se poursuivant sur le terrain certes, n'en apparaît pas moins “molle” aux yeux des observateurs de la scène sécuritaire. À titre d'exemple, on ne comprend pas pourquoi les actions engagées aujourd'hui par les forces armées ne soient plus médiatisées, comme par le passé. Serait-ce à cause de la concorde qui fait qu'il n'est pas de bon ton de parler de terrorisme ? Phénomène que Bouteflika, enclin à se présenter dans les habits de pacificateur, cherche à minimiser, puisqu'il n'hésite pas à parler, comme dans son dernier discours devant les militaires, d'une “Algérie convalescente”. Qui ne voudrait pas croire à cette approche optimiste voulant à tout prix conjuguer le terrorisme au passé. La réalité est là, à travers ces faux barrages en Kabylie, ces tueries cycliques à Chlef, Relizane et Médéa, pour nous ramener à une évidence obtuse, à savoir que la bête immonde, quand bien même frappée à mort, garde intacte sa capacité à faire encore des victimes expiatoires. Ce que reconnaissait, du reste, le général Lamari lui-même dans l'entretien qu'il avait accordé dernièrement au grand quotidien cairote, Al-Ahram. “Je ne peux affirmer que nous maîtrisons la situation sécuritaire à cent pour cent, car la présence d'une dizaine de terroristes armés représente en soi une menace pour le citoyen”, soutenait le chef d'état-major pour qui “la lutte contre le terrorisme ne se limite pas uniquement à l'armée et aux services de sécurité, mais elle devrait être consolidée par un discours politique et une mobilisation citoyenne”. Force est de constater que ce discours d'appoint, qui devait être développé par le biais des appareils idéologiques de l'Etat, comme l'école et la télévision, fait cruellement défaut. Sinon comment expliquer que 220 jeunes aient rejoint l'année dernière le maquis, comment expliquer aussi que la sortie de prison de l'énergumène Ali Benhadj ait donné “la tremblote” aux autorités de l'Etat au point de se croire en devoir d'empêcher les journalistes étrangers venus couvrir “l'événement”. La mise au cachot du chef islamiste, pendant douze ans, n'aura pratiquement servi à rien puisqu'il y a encore des jeunes qui se reconnaissent dans sa folie, puisqu'il y a aussi des attentats qui sont perpétrés aux quatre coins du pays. Comme celui de Boghni, vendredi. N. S.