“Dans la politique culturelle de l'Algérie, le livre est roi. Et on ne dérange pas les rois. Pour ne pas perturber le livre par les autres activités qui se tiendront dans le cadre du Panaf du 5 au 20 juillet prochain, nous avons avancé au mois de juin certaines manifestations autour du livre”, a déclaré la ministre de la Culture, Khalida Toumi, samedi dernier, à l'esplanade de Riadh El-Feth, lors de l'inauguration officielle du Festival international de la littérature et du livre de jeunesse. Ce dernier, qui en est à sa 2e édition dédiée exclusivement à l'Afrique, se tiendra jusqu'au 29 juin prochain, et propose au public, qui est attendu tous les jours à partir de 16h, des activités foisonnantes entre expositions de livres, ventes-dédicaces, jeux éducatifs, représentations théâtrales, lectures poétiques (dispensées entre autres par le comédien Sid-Ahmed Agoumi) et rencontres thématiques. De plus, des invités africains de marque ont entendu l'appel de l'Algérie à l'Afrique en répondant présent à ce grand rassemblement du livre, citons entre autres le Renaudot 2008, le Guinéen Tierno Monénembo, l'universitaire et auteure ivoirienne Tanella Boni, l'ancienne ministre de la Culture congolaise et écrivaine Mambou Aimée Gnali, l'écrivaine camerounaise Calixthe Beyala, l'écrivain algérien Anouar Benmalek, l'écrivain togolais Sami Tchak. Tous débattront de différentes problématiques liées à l'écriture en Afrique, notamment les thématiques de l'écriture africaine, l'oralité en Afrique, le journalisme culturel et la critique littéraire, la langue et les écritures en Afrique entre tradition orale et expression écrite ou encore l'édition en Afrique vue par les éditeurs. En outre, la journée de lundi dernier a été très chargée entre lectures poétiques, deux rencontres thématiques, un atelier d'écriture et des lectures de contes dispensées par la troupe malienne Golem Théâtre de Bamako. Dès 18h, la salle de conférences était pleine de monde, venu écouter Sid-Ahmed Agoumi dans ses pérégrinations poétiques et son voyage au bout de la mémoire. L'orateur a repris le verbe tranchant d'auteurs algériens, disparus pour la plupart, notamment un extrait du recueil de nouvelles la Meute de Mouloud Mammeri, le monologue de Lakhdar dans le Cadavre encerclé de Kateb Yacine, le poème Alger Ville ouverte de Jean Sénac, ainsi que l'Enfer et la Folie de Youcef Sebti et Plein Chant de Djamel-Eddine Bencheikh. Après cette séquence riche en émotions puisqu'elle a ressuscité des auteurs oubliés et fait ressurgir de vieilles blessures, la place a été cédée aux femmes, pour la 2e rencontre thématique du festival, portant sur la femme dans la littérature africaine. Animée par Fadéla Merabet, Calixthe Beyala, Tanella Boni et Mambou Aimée Gnali, l'universitaire Aïcha Kassoul a modéré cette rencontre. Chacune de ces écrivaines (qui revendiquent d'ailleurs le féminin d'écrivain) a évoqué son rapport à l'écriture, qui est souvent violent. Mais l'intervention la plus intéressante a été celle de Calixthe Beyala qui a considéré que “je revendique l'écriture féminine. Oui ! L'écriture des femmes est différente : il y a le choix des mots et des tonalités qui est différent”. L'écrivaine camerounaise a également estimé que la littérature écrite par les hommes a été une littérature d'opposition. De plus, “les hommes ont utilisé la femme comme un prétexte”. La femme a donc brisé les chaînes du silence, mais n'a pas encore trouvé sa place puisque l'écriture au féminin est encore aujourd'hui considérée comme un art mineur. Mais les littératures francophones, d'Afrique subsaharienne et du Maghreb, sont classées dans une sous-catégorie. En ce sens les femmes, tous crocs dehors, ont considéré que le Festival culturel panafricain ouvrait une brèche pour se rassembler et s'unir en tant qu'Africains, afin de trouver des solutions et de penser l'écriture africaine ensemble.