En dépit de timides signes de rebond, l'économie mondiale ne semble pas au bout de ses peines et risque d'être durablement fragilisée par la flambée du chômage et l'état de santé incertain du système bancaire, selon plusieurs experts. Enhardie par une flopée d'indicateurs meilleurs que prévu, l'administration américaine a claironné “le début de la fin de la récession”, tandis que la Chine continue d'afficher une croissance vigoureuse. Rassérénés, les marchés financiers sont repartis à la hausse. “Il y a des signes de décélération de la récession”, analyse un ancien haut responsable du Fonds monétaire international (FMI). Le risque d'un nouveau choc systémique comparable à la faillite de la banque américaine Lehman Brothers — épicentre de la crise mondiale — semble, par ailleurs, s'éloigner. “Les Etats utiliseront tous les moyens pour éviter la faillite d'un établissement financier”, juge Cinzia Alcidi, économiste au Centre for European Policy Studies, à Bruxelles. “On a évité l'effondrement du château de cartes de la finance mondiale”, résume pour sa part Elie Cohen, économiste au CNRS. Pour autant, la situation ne prête guère à l'optimisme et la fin de la récession ne sera pas synonyme de croissance vigoureuse, préviennent les spécialistes. “L'économie mondiale va stagner à un niveau très bas pendant longtemps”, prédit François Bourguignon, ancien vice-président de la Banque mondiale. “La crise est maîtrisée mais ses effets restent très sérieux”, ajoute Elie Cohen, qui estime que l'économie mondiale connaîtra bientôt “son heure de vérité”. De son côté, le président de la Banque centrale européenne (BCE) Jean-Claude Trichet, avoue que l'économie mondiale a cessé “sa chute libre”, mais la “zone d'incertitudes n'est pas encore derrière nous”. Pour lui, “nous sommes encore dans une période de contraction de l'activité économique” mais “nous sortons de (la) période de chute libre”, a déclaré M. Trichet, ajoutant toutefois qu'il fallait se garder “d'être très optimiste”. Car, affirme-t-il, la “zone d'incertitudes dans laquelle nous sommes placés depuis l'intensification de la crise à la mi-septembre 2008 n'est pas encore derrière nous”, appelant à la “prudence” et à la “vigilance”. R. E.