Lorsque Ramadhan s'invite en été, l'ambiance est à son comble. Certains optent pour les qaâdate feutrées au rythme traditionnel dans les kheïmas, alors que d'autres préfèrent le plein air et investissent les plages. 22h30, après la prière des tarawih, nous entamons notre virée à Bab El-Oued, dans l'un des quartiers les plus fréquentés de la capitale. Difficile de se frayer un chemin au milieu de la foule sur le grand boulevard pour rejoindre El-Kettani. L'affluence est inégalable dans les grandes artères où les commerces affichent mets et articles de tous genres (vêtements, jouets, articles scolaires, etc.). Les familles semblent renouer avec les sorties et s'offrent de longues balades et flâneries lors de séances de shopping interminables qui prennent un air de fête. C'est que le Ramadhan de cette année débarque en plein mois d'août, alors que les vacances ne sont pas encore achevées et que la canicule nargue les jeûneurs ; alors chacun y va de sa petite recette pour meubler les longues soirées. Certains optent pour des qaâdate feutrées au rythme traditionnel dans les kheïmas devenues désormais incontournables, et qui sont pratiquement proposées par tous les établissements hôteliers, mais pas seulement. Certains concessionnaires d'automobiles adoptent également la formule qui semble bien fonctionner et qui gagne même des représentants de marques de vêtements. Une nouvelle idée a aussi germé et ne manque pas de drainer du monde. Celle-ci consiste à proposer de l'animation au bord des piscines où même la baignade est permise. Une idée originale qui connaît un franc succès, notamment auprès des jeunes qui ont accès aux jeux (billard, jeux interactifs et autres distractions), comme c'est le cas à l'hôtel Safir Mazafran de Zéralda. Le tout est agrémenté par des concerts aussi bien au bord de la piscine que dans la kheïma. D'autres ont des goûts bien plus simples et s'adonnent au suspense des parties de cartes ou de dominos, dégageant des nuages de fumée de cigarettes. De nombreux jeunes passent ainsi de longues heures dans les cafés de leur quartier, à des terrasses ou dans les jardins publics à siroter du thé et apprécier kalbelouz et zlabia. Mais la grande attraction demeure sans nul doute la fréquentation des plages. El-Kettani grouille de monde en bord de mer comme à la placette. Les familles s'entassent et certains de ses membres s'aventurent même à aller se baigner aux côtés des enfants qui s'en donnent à cœur joie, barbotant au creux de petites vagues. “Ils viennent de Bab El-Oued et des environs et passent toutes leurs soirées ; souvent ce sont les mêmes familles qui reviennent”, nous raconte Houari, loueur de chaises à 25 DA, assurant que la sécurité est de mise même si l'on ne remarque pas l'ombre d'un agent de sécurité ou d'un élément de police. Certes, le commissariat est à proximité, mais jusqu'à présent, il n'y a eu aucune intervention, comme nous l'ont confirmé de nombreuses personnes présentes sur les lieux. Sur la placette, nous croisons encore plus de monde et les enfants semblent se permettre des soirées bien prolongées. L'univers des enfants et celui des adultes se côtoient ainsi en parfaite symbiose. Des petites échoppes de fortune vendent des jouets, des ballons, de la barbe à papa ou proposent des tours de manège. Pour les adolescents, place aux tables de billard et de baby-foot, alors que leurs aînés s'agglutinent autour du terrain de boules. Les cafés ne désemplissent pas aux côtés des vendeurs de brochettes et autres mets, même si le thé ravie la vedette. “Chaque soir, nous sortons nous balader. Ça nous change un peu de la morosité des longues journées. Le programme de la télévision est nul cette année et nous ne pouvons passer toute la journée à la cuisine”, nous confie Zineb, rencontrée en compagnie de sa sœur et de leur maman, assises tout simplement sur un banc faisant face à la mer. Ce tour en ville fait office d'une véritable bouffée d'oxygène pour un bon nombre de familles qui ne peuvent pas se permettre le luxe d'aller dans les soirées en salle ou dans les kheïmas où il faudra débourser au minimum 1 000 DA par personne. Du côté du littoral, à Sidi Fredj et Palm Beach, la fréquentation est moindre et la concentration demeure au niveau du port de plaisance de Sidi Fredj qui semble être la destination de toutes les saisons. “La plus grande affluence est enregistrée les week-ends pour se calmer les jours de semaine, mais sans cesser pour autant. De nombreux vacanciers venus de l'étranger ont décidé de prolonger leur séjour et profiter encore du soleil et du parfum de Ramadhan”, nous a déclaré l'un des commerçants au port de Sidi Fredj où à 1h du matin, de nombreuses familles se baladent encore le long de la jetée sans avoir l'air de se presser de rentrer. “Nous avons l'habitude de veiller jusqu'au s'hour, alors autant passer le temps ici et profiter de la brise marine. Bientôt la rentrée des classes et on ne pourra plus se permettre ces sorties, hormis le week-end”, nous dit une maman qui a assuré que c'est là une aubaine.