Les fidèles des mosquées sont satisfaits ; pour le Ramadhan de cette année, les imams organisent des prières de tarawih pas trop longues. L'expression « tarawih soft » circule parmi les citoyens. « La tradition fait qu'il faut finaliser la récitation de tout le Coran durant ce mois sacré, mais des orientations nous ont été données pour alléger les tarawih », indique un imam à Alger. Ces orientations proviennent-elles du ministère des Affaires religieuses et des Wakf ? Nombre d'imams ont confirmé cette information, mais d'autres ont précisé que les responsables des mosquées sont libres pour déterminer la durée des tarawih. « Les gens acceptent de terminer les deux hezb chaque soir, mais cela dépend de la voix des psalmodieurs du Coran et s'ils ont une excellente déclamation », relève un fidèle à la mosquée Takwa de Bab El Oued à Alger. « Il faut relever que les tarawih ne sont pas obligatoires comme les cinq prières quotidiennes, mais sont considérées comme un acte très méritoire », a souligné le professeur Youssef Benhalima, enseignant à l'université des sciences islamiques d'Alger. Pourtant, l'engouement et la bousculade caractérisent le mois de Ramadhan au niveau des mosquées du pays. Vieux, femmes, jeunes et petits se dirigent en masse vers ces lieux de culte. « Avec la généralisation des climatiseurs et des ventilateurs, les tarawih devraient normalement aboutir à la finalisation du Coran dans de bonnes conditions », note M. Benhalima. Or, un joueur invétéré de dominos au café Malakoff – lieu que fréquentait feu El Hadj El Anka – accomplit sa prière d'El Isha tout en refusant « slat el kiyad fel ouwachir ou el eyad » (La prière des chefs qui ne se fait que lors des cérémonies et des fêtes). Il rappelle que les tarawih furent établies par le Prophète qui les dirigea occasionnellement de peur que cela ne devienne obligatoire pour les fidèles. Après sa mort, son successeur, Abou Bakr Seddik, n'a pas continué de les pratiquer durant ses 2 années de califat. C'est le second calife, Omar Ibn El Khattab, qui les réinstaura. Fait de société ou tendance religieuse, les jeunes n'approuvent pas les psalmodieurs « TGV », alors que les vieux préfèrent le style Djamaâ El Djedid « Je n'aime pas faire les tarawih derrière un psalmodieur qui va à 200 km comme un TGV », note un jeune devant la mosquée Khaled de Belouizdad. Les jeunes sont aujourd'hui branchés sur Abderahmane Soudaïssi ou Al Afassy, à travers les chaînes TV satellitaires. D'autres ont la nostalgie de feu Abdelbasset Abdessamad ou de Djaber, fait rappeler un vendeur de CD religieux à Bachdjerrah. Mais un vieux, à la mosquée Ketchaoua, préfère les récitateurs de Djamaâ El Kebir dont la lecture d'antan est dans le style andalou. « On aurait dû avoir nos propres références dans la récitation du Coran et ne pas copier les autres », s'exclame ammi Rabah, sexagénaire habitant La Casbah. Des fidèles changent de mosquée pour aller écouter tel bon psalmodieur dans un quartier et les discussions tournent autour de noms de stars. Des mosquées sont alors désertées, car le récitateur n'a pas l'audience et le succès qu'il faut. Pourtant, en Islam, « chaddou rihal est déconseillé. C'est-à-dire qu'il n'est pas bon de décider d'aller vers d'autres mosquées que celle de la région où l'on habite, car toutes les mosquées se valent », indique un formateur à l'Institut de formation des cadres des affaires religieuses, sis à côté de la salle Harcha.