Une nouvelle génération d'imams est née. Ils sont jeunes, charismatiques et leurs voix mélodieuses attirent chaque Ramadhan des dizaines de milliers de fidèles dans les mosquées de la ville et des villages de Bordj Bou-Arréridj. À l'heure de la prière, les mosquées de Bordj Bou-Arréridj sont bondées surtout le soir. Psalmodies, cours religieux, prêches, tarawih fédèrent de plus en plus de pratiquants. Ces dernières années, une nouvelle génération d'imams est née. Ils sont jeunes, charismatiques et leurs voix mélodieuses attirent chaque Ramadhan des dizaines de milliers de fidèles dans les mosquées de la ville et des villages de Bordj Bou-Arréridj. Ce sont des stars du minbar ! Et comme chaque soirée de Ramadhan, la mosquée Abou Bakeur Essedik et son esplanade sont prises d'assaut par des milliers de fidèles, venus écouter le cheikh Walid, la vedette du minbar de la capitale des Bibans. Les raisons d'une telle popularité : le style du jeune imam. Cheikh Walid psalmodie le Coran avec une rare ferveur, réussissant à tenir la foule en haleine pendant plus d'une heure et demie. L'imam a une technique bien rodée, bâtie sur l'émotion. Chaque fois qu'il évoque l'enfer ou les autres châtiments du pécheur, mais aussi le paradis et ses splendeurs, hommes et femmes tombent en pleurs. Une fois accrochés, les fidèles sont à la merci du cheikh qui prend plaisir à répéter les versets les moins cléments. La tension monte. Jusqu'à la transe, parfois. L'exercice est physique, c'est pourquoi les corps craquent à la fin du Ramadhan, et spécifiquement lors de la Nuit du destin (Laïlat Al Kadr), lorsque la fréquentation de la mosquée atteint un pic de milliers de fidèles. Une telle ferveur ne relève pas du monopole de la seule mosquée Abou Bakeur Essedik, même si elle est aujourd'hui la plus fréquentée de toutes. Ailleurs dans la ville, de jeunes imams sont devenus de véritables vedettes locales, attirant les fidèles dans des mosquées bondées à Lagraphe, village nord, Dallas, Kouicha et dans le très chic quartier Lagare. Même dans les villages, ces jeunes imams sont aussi présents avec leurs voix charmeuses qui enchantent les nuits calmes de la campagne. Leurs prestations, enregistrées sur des DVD par leurs nombreux fans, se vendent comme des petits pains, durant tout le mois de Ramadhan et même après. La popularité de ces authentiques “popstars” de la chose religieuse, qui dépasse les banlieues de la ville, s'est exclusivement construite par le bouche-à-oreille. Et s'ils remplissent les mosquées, et même les rues avoisinantes, c'est grâce à leur savoir en théologie et surtout par la magie de leurs voix. Pourquoi eux et pas d'autres ? “Tout simplement parce que les Bordjiens ne veulent plus des vieux imams, qui lisent le Coran de manière austère, comme un CD rayé où les fidèles n'arrivent même pas à déchiffrer les mots. Ils leur préfèrent une belle voix qui émeut”, expliquent-ils. “C'est un mois où je dois chercher le beau, le meilleur et surtout ne pas m'énerver. Je viens ici pour être émerveillé par les paroles de Dieu bien récitées par ces imams”, dira un des fidèles en sortant de la mosquée. “Le mois sacré est par excellence une période spirituelle, de ferveur et de piété”, conclut un autre fidèle. La prière terminée, des fidèles se rassemblent à la sortie de la mosquée, pour discuter de l'interprétation de la soirée. D'autres entourent l'imam pour demander des explications ou tout simplement s'approchent de lui pour le féliciter.