“À Oran, on a tous des amis qui ont été déportés, des gens qu'on a cachés et d'autres qu'on a mariés de force pour qu'ils puissent rester en Algérie. Avec le recul, ces scènes ressemblent à celles de la Seconde Guerre mondiale où des voisins cachaient leurs amis juifs pour leur éviter les camps nazis.” C'est le témoignage de Khaled, notre star nationale, au magazine marocain Tel Quel. Ses paroles ont-elles dépassé… ce qui lui tient lieu de pensée ? Et doit-on l'obliger à savoir ce que fut exactement la Shoah ? Khaled aura droit à la clémence nationale non pas parce que sa constitution intellectuelle le rend pardonnable, mais parce qu'il est justement membre de la société civile officielle, cette nébuleuse faite de sportifs, d'artistes, d'associatifs, privilégiée et satellisée autour du pouvoir. Elle est constituée de “personnalités” complaisantes qui savent apporter leur soutien au pouvoir. Un journaliste, pour moins que cela – un journaliste ne peut raisonnablement pas comparer le régime algérien au régime nazi — aurait connu, “sur l'heure”, la promptitude du bras séculier du pouvoir national. Mais Khaled fait partie de ces enfants gâtés devant lesquels s'arrête la compétence “universelle” de la justice et s'adoucit la brutalité de la vindicte populaire. L'impunité de ce “proche” ne date pas d'aujourd'hui : il y a une décennie, Khaled, alors sous le coup d'une condamnation, a été invité à se présenter devant une justice qui l'attendait pour le blanchir, sans avoir à “vider son mandat d'arrêt”, préalable procédural sacro-saint. Avant d'être d'autorité dispensé de service national. Son débridement verbal a été encouragé par la permissivité de la société et de l'Etat envers ceux qui savent dire que le pays va bien parce que ça va pour eux. Ils suppléent ainsi de manière politiquement rentable une société civile éradiquée par la corruption et la répression. Mais ses fans n'ont pas à s'inquiéter : Khaled n'est pas dans le cas de Mami qui a affaire à une autre justice. Il n'est surtout pas dans le cas de Ferhat Mehenni qui, en plus d'être chanteur, est militant d'une cause et qui, pour avoir exprimé une revendication responsable, est sous le coup d'un mandat d'arrêt. Khaled n'est pas un journaliste dont on scrute les délits de diffamation jusqu'entre les lignes et pour qui l'autosaisine semble avoir été inventée. Il n'est pas Noureddine Amirouche qui suscita la curée pour avoir remis en cause l'arithmétique officielle des chouhada ! Khaled a l'excuse de n'être ni brillant ni engagé et l'avantage d'être du bon côté… L'opinion publique maison, si prompte à se froisser des révisionnismes, regardera ailleurs pour ne pas avoir à se compromettre dans un scandale venu de l'Ouest. L'Algérie officielle fera semblant de n'avoir pas entendu cet affront commis au-delà d'une frontière sélective. Khaled se dit “de la famille” de Mohammed VI. Il n'y a pas de mal à se fréquenter entre “rois”, le roi d'un peuple et un roi people ! Et il parle avec lui, comme avec le président Bouteflika, dit-il encore, des relations entre les deux pays ! L'acte révisionniste stupide est soutenu par des références politico-mondaines, ce qui en fait une drôle d'histoire de président, de roi et de king. De quoi je me mêle ? M. H. [email protected]