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Apanage des seules élites algériennes francophiles
Le français
Publié dans La Nouvelle République le 13 - 04 - 2025

Les autorités algériennes viennent de décréter l'interdiction formelle de toute aide française destinée aux écoles privées algériennes, aide octroyée dans le cadre du dispositif AFD (aide française au développement). Pour rappel, pour encourager l'enseignement de la langue française en Algérie, la France octroie des aides à des établissements scolaires privés.
Une chose est sûre, s'il y a «butin linguistique français», c'est un butin qui ne profite qu'à une petite caste d'intellectuels, d'hommes politiques et d'affaires, de cadres et d'universitaires. Un riche butin que ces élites algériennes francophones et francophiles ne manquent pas de monnayer, fructifier.
Ironie de l'histoire, le paradoxe c'est que, au cours des 132 ans de colonisation, l'Algérie n'a jamais été francophone. Les Algériens étaient exclus et du système scolaire et de l'espace politique colonial français.
En réalité, la francophonie, au sens linguistique du terme désignant l'ensemble des citoyens libres et des institutions indépendantes qui utilisent le français comme langue d'usage, d'enseignement et de l'administration, a été instauré concrètement au lendemain de l'indépendance de l'Algérie en 1962. Par la minoritaire élite francophone. D'aucuns diraient francophiles. La «francisation» scolaire et administrative des Algériens a commencé en 1962. Elle est l'œuvre du nouvel Etat indépendant algérien. Autrement dit, au cours des années 1960-1970, l'Algérie indépendante aura mieux développé la langue française que la France coloniale. Ne pas perdre de vue qu'en 1962, à l'indépendance de l'Algérie, 92% de la population étaient analphabètes. Cependant, contrairement à ce que laisse entendre nombre d'intellectuels algériens, les Algériens, en devenant indépendants, ne sont pas devenus propriétaires de la langue de leurs anciens maîtres. La langue du colonisateur demeure la propriété de la France, des Français. Les Algériens bénéficient seulement de l'usufruit de la langue de Molière.
Ils disposent du droit d'usage de la langue française sans avoir le titre tricolore de propriété.
D'ailleurs, les élites intellectuelles et culturelles de l'Hexagone ne sont nullement dupes de cette prétention des ex-colonisés de s'attribuer les mérites de l'usage de la langue française. En France, les élites comme la classe politique établissent systématiquement une distinction entre la littérature «française» et la littérature «francophone». La première renvoie aux œuvres littéraires produites par les écrivains français de souche, la seconde désigne les productions littéraires des écrivains allogènes originaires du Maghreb et de l'Afrique. Notamment d'Algérie. En tout cas, la langue française ne peut être considérée comme un butin de guerre. Pour rappel, c'est à Kateb Yacine, stalinien impénitent, et esprit assurément pas pénétrant mais colonialement pénétré, au point de cultiver une haine de soi symbolisée par son aversion pathologique des deux fondements de l'Algérie, la langue arabe et l'islam, que l'on doit la popularisation de cette spécieuse formule proférée sous forme de slogan, de tirade théâtralement débitée : «La langue française est notre butin de guerre».
Son impertinent cri de ralliement s'adressait assurément à ses congénères lettrés vivant dans leur tour d'ivoire, c'est-à-dire la petite caste d'intellectuels francophones fabriquée par la France coloniale par la grâce de la langue d'allégeance : le français. Car ce slogan ne pouvait concerner les 92% d'Algériens analphabètes, pour qui le français était personnifié par le colon, incarné par Bugeaud et Bigeard, et non pas Molière et Victor Hugo. Kateb Yacine devait avoir une mentalité de pauvre pour s'imaginer riche avec son dérisoire « butin de guerre » concédé mesquinement par la France coloniale. En fait, dans le cas de ces élites algériennes francophones, au vrai il ne s'agit pas d'un butin de guerre, mais plutôt d'un bulletin d'adhésion à la langue française coloniale. Et, par extension, à la culture de ses titulaires. Au paradigme politique et philosophique de la France, en vertu du principe que toute langue, à plus forte raison en position d'hégémonie, véhicule les représentations sociales, les systèmes de valeurs et les schèmes de pensée intrinsèquement liés au pays tutélaire. Pour autant, lorsqu'on emploie l'expression « butin de guerre », cela implique que nous aurions (algériens) pris possession d'un immense trésor inestimable qui nous aurait prodigieusement enrichi. Or, à l'époque coloniale, dans le cas de la langue française, celle-ci n'avait jamais permis aux «indigènes algériens» de s'enrichir intellectuellement, encore moins de prospérer scientifiquement. Pour preuve : à l'indépendance, seuls 8% de la population algérienne était rudimentairement scolarisée. Kateb Yacine lui-même n'a pu dépasser le cycle secondaire : il n'a même pas obtenu son baccalauréat. Aussi, le français n'a jamais constitué notre butin de guerre. En revanche le Français (colonial) nous a toujours mené une putain de guerre (d'extermination simultanément démographique, culturelle, cultuelle, civilisationnelle, linguistique).
L'élite francophone sacralise le français et sacrifie l'arabe
La langue française, outre le fait qu'elle fut parcimonieusement dispensée à une infime minorité, fut en vérité le cheval de Troie de la politique d'assimilation culturelle instaurée par la France coloniale. Elle ne fut jamais un attelage chargé de tracter les savoirs scientifiques pour libérer les potentialités intellectuelles du peuple algérien.
Lui accorder les opportunités universitaires en vue de lui ouvrir les voies de son émancipation politique, de son progrès socioéconomique, de son indépendance nationale. La langue du maître Français fut dispensée à une minorité d'indigène musulman pour lui permettre de devenir, non pas une élite cérébrale, mais le dévoué cerbère politique voué à administrer loyalement ses coreligionnaires analphabètes au profit de la puissance coloniale française.
A suivre…
Khider Mesloub
Entre les mains des quelques lettrés soigneusement sélectionnés, le français constituait-il une arme pour lutter potentiellement contre le colonialisme ou une ceinture explosive ceinte autour du corps social du peuple algérien pour faire imploser concrètement sa langue arabe (kabyle), sa culture millénaire, ses racines arabo-berbères, sa religion musulmane ? Cette langue française permettait-elle de s'ouvrir au monde comme le proclamaient (encore aujourd'hui) les thuriféraires de la culture élitiste coloniale, ou travaillait-elle à la marginalisation et épuration de l'univers identitaire arabo-berbère, c'est-à-dire à la disparition de « soi-collectif » algérien, exécutée par une forme de suicide culturel ?
Une chose est sûre, de nombreux Algériens francophones et francophiles, pourfendeurs de l'arabisation de l'enseignement algérien, avec leur mentalité de colonisé expliquant leur amour immodéré de la langue et de la civilisation françaises pourtant en pleine putréfaction, peuvent reprendre à leur compte cette proclamation de foi servilement déclamée par le poète malgache Jacques Rabemananjara en 1959 à propos de la langue française: «Nous nous sommes emparés d'elle, nous nous la sommes appropriée, au point de la revendiquer nôtre au même titre que ses détenteurs de droit divin.»
Voilà : la langue française est devenue leur langue sacrée, au point de vouloir sacrifier la langue maternelle et officielle du peuple algérien : l'arabe, pourtant réellement langue sacrée, étant la langue du Coran. Sans oublier la langue tamazight pour les berbérophones, pourtant langue matricielle. Cette langue matrice tamazight qui renferme tout un fond sensible collectif, tout un imaginaire collectif structurant la culture et la personnalité du peuple algérien.
Cette autre proclamation de foi française écrite par un auteur haïtien au début du XXe siècle peut également être appropriée par ces Algériens sectateurs de la francophonie : « Notre langue est française, françaises sont nos mœurs, nos coutumes, nos idées et, qu'on le veuille ou non, française est notre âme. ».
L'âme de ces Algériens culturellement néo-colonisés est incontestablement française, comme leur arme est la langue française, ce butin de guerre fièrement revendiqué comme faisant partie intégrante du patrimoine linguistique algérien.
Le français virus linguistique pirate infiltré dans le logiciel éducatif algérien
C'est avec cette arme française que ces hommes liges de la France, adoubés par l'Elysée, comptent tuer l'âme algérienne, assassiner la culture arabo-berbère, ressusciter la suprématie culturelle française. Assiéger l'Algérie avec leur cheval de Troie : le français, ce système linguistique pirate infiltré dans le logiciel intellectuel et éducatif de l'Algérien. S'introniser, au terme de leur Odyssée néocoloniale, Rois de l'Algérie francisée. Franchisée. C'est-à-dire une Algérie devenue succursale de la France.
Comment un butin de guerre instrumentalisé par des Algériens francophiles, cette « cinquième colonne culturelle », pourrait devenir triomphalement le trophée de guerre de la France impérialiste contemporaine, si l'Algérie continue à souscrire à ce bulletin d'adhésion linguistique néocoloniale. À cette francophilie néocoloniale.
Ces Algériens francophiles sont des « invertis nationaux ». Au lieu d'épouser les valeurs culturelles, linguistiques, morales et politiques produites par le pays, ces élites algériennes n'éprouvent de l'amour culturelle qu'à l'endroit des Français, leurs frères de lit linguistique avec lesquels ils partagent charnellement leur «organe langagier». Ces molles élites algériennes sont attirées uniquement par la France, magnifiée pour sa supposée puissance culturelle, sa virilité économique, son dynamisme politique. Elles aiment se donner politiquement aux Français, apparemment dotés d'organes institutionnels plus musclés. S'offrir moralement à eux. Se prosterner devant leur organe langagier. Se plier à leurs désirs sans se faire prier. Se dévouer à la culture française. Se vouer à la langue française, érigée en déité linguistique.
À notre époque décadente marquée par l'invasion de la théorie du genre, qui vise à entretenir une confusion entre les identités sexuelles ; caractérisée par le basculement des valeurs morales, on peut dire de ces Algériens francophiles « retournés » qu'ils sont « nationalement invertis ». C'est-à-dire ce sont des citoyens algériens qui, au lieu d'avoir de l'attachement patriotique à l'égard de leurs frères de sang, de nouer des relations naturelles d'amour nationale avec leurs compatriotes, manifestent l'inversion nationale (qui rime avec aversion nationale). Autrement dit, ils s'unissent exclusivement aux citoyens français dans une intimité culturelle contre-nature, s'offrent à eux dans une relation passive de soumission idéologique masochiste, d'allégeance politique traîtresse, de docilité intellectuelle renégate, au nom de valeurs prétendument universelles incarnées uniquement par la France « démocratique ». En résumé, ils aiment se faire fouetter par leur maître, les Français, idéalisés, vénérés et idolâtrés.
Un acteur français a écrit à propos de la soumission : «Moi, mon père, il me l'a transmise, la soumission. Mais avec un brin d'orgueil, un brin de noblesse». Dans la même veine, l'Algérien francophile néo-colonisé pourrait écrire dans la langue de Molière qu'il révère : «Moi, la France, elle me l'a inoculée, la servitude. Mais avec condescendance, dédain qu'elle réserve à l'engeance servile de mon espèce».


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