La Grande-Bretagne refuse de les accueillir sur son sol et de leur offrir l'asile. Le Royaume-Uni n'est plus une terre d'asile. À ceux qui reprochaient au gouvernement britannique son indulgence à l'égard des immigrés clandestins, celui-ci répond par une politique plus ferme. Fini le temps où le pays offrait le refuge aux persécutés, affluant des quatre coins du monde. Alors que les demandes d'asile sont en augmentation constante, le nombre des acceptations décline incommensurablement. En témoigne l'attitude observée par les responsables politiques suite au démantèlement du camp des sans-papiers à Calais. L'offensive menée mardi dernier par les forces antiémeutes françaises dans ce cantonnement, situé à un kilomètre du tunnel sous la Manche, a suscité une grande exultation auprès des officiels britanniques. Alan Johnson, premier responsable du Home Office, ministère de l'Intérieur, a congratulé ses homologues français pour la réussite de l'opération. En même temps, il a écarté l'idée selon laquelle la Grande-Bretagne pouvait accueillir sur son sol les expulsés du camp de Calais et leur offrir l'asile politique. “Les informations laissant entendre que le Royaume-Uni serait forcé à les recevoir sont totalement fausses. Ces gens-là devaient demander l'asile dans le premier pays où ils sont arrivés”, a commenté le collaborateur du Premier Ministre Gordon Brown. 278 clandestins, dont 113 enfants, ont été appréhendés durant l'assaut et placés dans des centres de rétention. La plupart des occupants du camp sont originaires de pays en guerre, comme l'Afghanistan, l'Irak et l'Erythrée. Ils avaient posé leur baluchon à Calais, dans l'attente de traverser le tunnel sous la Manche et de parvenir en Angleterre, où ils pensaient pouvoir obtenir le statut de réfugiés. Il y a encore quelques années, le Royaume-Uni était le pays d'Europe le plus souple en matière de politique migratoire. Les demandeurs d'asile notamment étaient traités avec une plus grande bienveillance. Les Algériens en savent quelque chose, car pendant la décennie noire du terrorisme, de nombreux islamistes avaient abusé de ce droit en criant à la persécution. Or, aujourd'hui, les choses ont changé. Ployant sous le poids d'une population étrangère importante et vivant souvent des subsides de l'Etat, les autorités britanniques cadenassent les frontières du royaume. Les immigrés de la pauvreté et de la guerre n'y sont guère les bienvenus. Londres estime qu'elle a poussé sa compassion un peu trop loin alors que d'autres pays européens, comme la France par exemple, sont peu enclins à appliquer les conventions internationales en matière de droit d'asile. En 2002, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, fermait un premier camp à Sangatte. À cette époque aussi, le gouvernement britannique avait exprimé sa délectation. L'opération marquait le début d'une coopération plus dense entre les deux pays pour la lutte contre l'immigration clandestine. M. Johnson évoque un plan concerté. Il y a quelques mois, Phil Woolas, ministre d'Etat en charge des Affaires migratoires, pressait Paris de fermer le camp de Calais et de renforcer le contrôle au niveau de ses frontières. Une série de reportages sur la télévision britannique a montré les tentatives très risquées des sans-papiers de traverser le tunnel sous la Manche, recroquevillés dans les entrailles d'un camion semi-remorque ou accrochés à ses portes. Les autorités britanniques accusent des réseaux de passeurs d'exploiter le désespoir des clandestins. Un réfugié afghan interviewé par la BBC dit avoir versé 10 000 livres, soit plusieurs années de salaire, à un passeur pour arriver jusqu'à Calais. Evidemment, si ce genre de péripéties interpelle les journalistes et les militants des droits de l'Homme, les politiques ne s'en émeuvent guère. La droite britannique accuse le gouvernement de mollesse dans le traitement du dossier des sans-papiers et l'avertit contre toute tentative de décréter une amnistie. S. L.-K.