À quelle loi obéit l'activité commerciale en Algérie destinée à l'intérêt public ? La question se pose aujourd'hui avec acuité devant l'anarchie qui caractérise le monde des vendeurs, notamment les boulangers et les commerçants versés dans l'alimentation générale et les légumes et fruits. Près d'une semaine après la fête de l'Aïd el-Fitr, certains commerces sont toujours fermés, sans autorisation préalable et sans que les services compétents de la wilaya ou de l'APC ne se préoccupent du coup porté au service public. Pourtant, pour celle ou celui qui garde encore en mémoire le calvaire vécu pendant les journées des 20 et 21 septembre derniers, cet absentéisme n'est que le prolongement d'une situation marquée du sceau de la démission de l'Etat et des dirigeants au niveau des collectivités locales. En effet, pendant les deux jours de l'Aïd, de nombreuses villes et régions du pays sont restées sans le service commercial minimum. Comme à l'accoutumée, les commerçants, parmi eux les boulangers, les restaurateurs et les épiciers, pour ne citer que ceux-ci, ont préféré baisser rideau, y compris dans la capitale, pénalisant de la sorte le consommateur et le voyageur. Résultat : les citoyens se sont retrouvés abandonnés à leur sort, non seulement le premier jour de la fête religieuse, mais aussi le deuxième jour et les jours suivants. Tout compte fait, les appels des représentants des commerçants n'ont pas convaincu les détaillants à se mettre au service de leur clientèle. À titre illustratif, le seul produit pain a suscité des files d'attente interminables devant les quelques boulangeries qui ont répondu présent. Cela s'est évidemment accompagné par des bousculades et des altercations, souvent entre les acheteurs, ainsi que par l'irruption de vendeurs informels, qui ont alors imposé leur loi en matière de prix. Dans ce genre d'affaire qui, faut-il le rappeler, porte préjudice à l'activité réglementée et à l'image des autorités publiques, les grands absents ont été, sans conteste, les services des wilayas et des APC, chargés pourtant d'assurer un contrôle continu de l'activité commerciale et de protéger le consommateur. Ce constat, maintes fois établi par les citoyens, les médias, voire même par les pouvoirs publics, n'est pas un fait isolé. L'anarchie qui envahit le marché algérien et les dysfonctionnements rencontrés dans les activités commerciales, toutes spécialités confondues, renvoie à une problématique globale, qui nous renseigne sur le retrait de l'Etat des fonctions de régulation et d'encadrement et, fait dialectique, sur l'entêtement des réflexes archaïques, puisque la notion de loi et de civisme, des droits de chacun et des obligations vis-à-vis de la collectivité reste faible, sinon absente. L'autre constat a trait à l'instauration du nouveau week-end et aux aberrations qui s'en sont suivies. Plus d'un mois après son établissement, il est toujours difficile de savoir qui du vendredi ou du samedi est assumé comme jour hebdomadaire, pour la simple raison qu'aucune décision officielle n'est venue le confirmer. Alors que le passage au week-end semi-universel, à partir du vendredi 14 août 2009, a provoqué la confusion et des interrogations chez le commun des citoyens. D'aucuns rétorqueront qu'il existe une ancienne loi qui indique que seul le vendredi est jour hebdomadaire. Si tel est le cas, pourquoi a-t-on laissé les entreprises économiques, les administrations ou les universités, organiser elles-mêmes leur journée de repos hebdomadaire ? C'est dire que là aussi, la situation a besoin d'être clarifiée et structurée. Cela d'autant que des commerçants, déboussolés par les changements récents ou encore favorables pour travailler un vendredi et se reposer le lendemain, font état d'intimidations et de menaces émanant d'individus qui leur exigent de fermer boutique le vendredi et aux heures de prière. Parce qu'il n'a jamais eu lieu, le débat sur le nouveau week-end et sur l'ouverture des commerces le vendredi n'est pas encore clos. En l'absence de textes de loi faisant obligation aux commerçants d'organiser des permanences pendant les jours de fête et les week-ends, comme c'est le cas pour les hôpitaux et les stations d'essence, l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) a lancé, à l'issue de son dernier conseil national, un appel à ses adhérents pour ouvrir leur commerce les vendredis. L'organisation professionnelle a aussi annoncé que le samedi sera une journée de travail pour les commerçants. L'UGCAA s'est, en outre engagée, à mener une campagne de sensibilisation auprès des commerçants pour “les inciter à s'adapter au nouvel aménagement du week-end”. Mais que peut faire une organisation comme l'UGCAA, du moins de façon durable, alors qu'elle est elle-même sujette à des crises cycliques ? Hafida Ameyar